Le voyage avait été long et éprouvant. Morphée venait de poser le pied à Paris que déjà, elle marchait d’un pas décidé dans le château de son roi. Elle avait eu vent des récents évènements entre Charles et Philipe d’Angleterre et ça n’avait pas du tout rassurée la demoiselle bien loin de son roi. Elle avait retrouvé depuis peu son ami d’enfance et c’était difficile pour la pauvre blonde de le quitter surtout dans des temps si agités. Surtout lorsque la guerre avait été officiellement déclarée. Mais, la belle avait écouté les ordres de l’homme le plus influant de France sans discuter. Elle avait traversé le territoire français le plus rapidement possible avant de se retrouver coincée à la frontière italienne. Ce fut pour le moins difficile de résister aux envies de meurtre qu’elle avait eu lorsqu’elle fut confrontée à tous ces idiots qui tentaient de lui barrer la route sans raisons valables. Mais, avec toute la diplomatie dont elle était capable, la gérante de maison close avait réussi à s’extirper de cette situation délicate avant de remonter à la capitale à brides abattues.
Qu’était-il arrivé ? Comment allait-elle trouver le roi ? Etait-il gravement blessé ? Toutes ces questions hantaient l’esprit du bourreau de Paris alors que la route défilait à vive allure. Elle n’aurait jamais dû l’abandonner. Mais comment désobéir à un ordre direct sans se faire envoyer sur les roses ? Malheureusement, on ne pouvait réécrire le passé et Morphée le savait très bien. Cela ne l’empêcha pas de faire tout pour revenir le plus vite possible à la capitale, usant presque jusqu’à la limite maximum la pauvre bête qu’elle avait récupéré quelques lieux plus bas. Elle s’était même posé la question de se transformer mais un loup galopant les plaines françaises en direction de Paris aurait sans doute fait mauvais effet. Surtout que peu de gens étaient au courant de sa particularité physique. Belladonna lui manquait énormément en cet instant pour essayer de rester calme et rationnelle. Mais, elle n’était pas là, la délicieuse vampire qui avait une place si particulière dans son cœur meurtrit. Morphée arriva au petit jour devant le château du roi. Le vent soufflait, bougeant ses cheveux ainsi que sa robe de voyage avec délicatesse alors que ses pas battaient le carrelage à un rythme effréné, la pauvre louve se retenait à grand mal de courir pour rejoindre cet ami d’enfance si précieux à ses yeux. Elle poussa la lourde porte menant au réfectoire et lorsqu’elle vit la petite tête blonde de Charles, elle ne put retenir un soupir de soulagement. Il était vivant. Et en prime, le roi semblait avoir plutôt bonne mine. La jeune femme laissa son cœur se calmer un instant après cette entrée fracassante, elle remit une de ses mèches blanches correctement avant de s’avancer à nouveau, saluant les gardes d’un signe de la tête. Ils ne devaient pas la reconnaître mais elle s’en moquait, elle devait parler à son ami, elle devait voir de ses yeux bleus l’étendus des dégâts causés par ce maudit roi de l’île voisine. L’épéiste fit une légère révérence devant l’homme avant de lui sourire doucement. « Mon roi, c’est un plaisir de vous revoir entier. » Pas un seul de ses cheveux laiteux ne pensa qu’il pouvait avoir perdu la mémoire. Comment cela aurait pu être possible ? Par quelle magie ? Son sang animal s’agitait en elle, passablement inquiète malgré tout. Un sixième sens peut-être. « Permettez-moi de m’installer avec vous pour le déjeuner, j’ai des nouvelles d’Italie à vous apporter, comme vous me l’avez demander. » Joignant le geste à la parole, la jeune femme tira une chaise au haut dossier pour s’y installer rapidement, pressée de se retrouver seule avec son ami et de ne plus jouer la femme de haute sociéter.
Ce matin n’avait pas été plus différent que ces prédécesseurs inscrits à la tablée de Chronos. Charles s’était éveillé avec les premières lueurs du jour, s’était apprêté religieusement en se faisant aider par moment par ses domestiques – dont il peinait encore à se rappeler le nom avec précision, ils étaient si nombreux que cela le perturbait – et avait été faire un tour dans le jardin, comme à l’accoutumée. Vint ensuite pour lui l’heure de prendre son repas du matin.
Non pas que cela l’agaçait de se plier à de telles habitudes, mais il aurait voulu, en cette matinée en particulier, rester un peu là, à admirer les fleurs blanches et boutonneuses. Admirer ces belles demoiselles sur lesquelles rien ne semblait peser mettait du baume au cœur à Charles. Il avait presque l’impression de ne plus rien peser dans ces balances des pouvoirs… Ce qui n’était bien sûr qu’une grossière illusion dans laquelle il se baignait tout entier, des pieds à la tête. Il était plus que jamais au centre des conversations et cela finissait par le mettre très mal à l’aise, au point qu’il recherchait davantage la compagnie de la solitude et du silence que celle de ses semblables. Ce n’était en rien la bonne solution à engager mais Charles se retrouvait désormais si désemparé qu’il ne savait plus quoi faire d’autre. Il se sentait l’âme d’un enfant perdu. Celui qui était, s’il en croyait les dires de son ami le Duc de Saint-Cloud, haï au plus haut point par son père. Celui qui avait tué sa mère pour vivre sur cette terre. Celui qui…
Il eut un brusque mal de crâne qui le prit tout entier, sans prévenir. Charles grinça des dents. Il était grand temps pour lui de cesser ses rêveries. Il avait un rôle à assumer ; qu’il n’avait certes pas choisi mais qu’il ne devait pour autant ignorer. Ainsi se dirigea-t-il vers le grand salon royal, faisant office de ‘réfectoire » pour sa Majesté le Roi. Des cuisines toute proches arrivaient déjà plusieurs mets, préparez pour lui en prévision de son réveil. Mais très honnêtement, quand bien même Charles voyait bien que des heures de travail et d’application avait été mise dans ces préparations, il ne parvenait pas à en désirer une part pour autant. Il ne le ferait par habitude, obligation. C’était le ballet courant depuis son réveil, après tout.
Il soupira aussi silencieusement que possible et allait pour débuter son déjeuner lorsqu’une entité s’apparentant davantage à une tornade blanche qu’autre chose s’invita dans la même pièce que lui et les domestiques qui se permettaient des allées et venues. Peut-être n’était-ce qu’une vue de l’esprit, mais il sembla à Charles qu’un vent frais s’était frayé un chemin jusqu’à lui à la seconde où cette jeune femme était venue s’inviter à sa table. Il n’a d’ailleurs pas le temps de lui adresser un mot qu’elle prend place près de lui. Non pas que cela le dérange, loin s’en fut, il avait désormais quelque chose autre que son repas sur lequel fixer son esprit. C’était en soit une délivrance légère. Mais voilà, les lèvres de la sylphide étrangère se délièrent, laissant cette fois place à un certain malaise. Encore une chose qu’il avait oublié… La culpabilité le rongea un instant et il se refléta dans ses yeux les galbes de sa lassitude prononcée. Avec un sourire peiné, toute fois, il répondit le plus adroitement possible à son interlocutrice non annoncée. Il ne voulait surtout pas la froisser. « Je… j’ignore si vous êtes au courant des récents évènements mais… Pour l’heure je souffre d’une forme d’amnésie prononcée alors beaucoup de choses m’échappent encore. Aussi, je suis navré mais je ne me souviens pas de la mission que j’aurai pu vous donner auparavant… »
Il ne restait plus qu’à voir si les mots glissés n’allaient pas être mal interprétés.
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Ven 20 Oct - 18:39
Dans la lumière, une main t’atteint.
ft. Charles & Morphée ۰ Ex Cathedra.
Ce château, elle le connaissait par cœur. La jeune femme aurait pu se déplacer dans les longs corridors les yeux fermés tant rien n’avait changé malgré les années d’absence et d’expatriation. Elle se rappelait les courses folles pour essayer d’attraper son ami avant ses leçons pour lui donner un gâteau qu’elle avait volé aux cuisines, de ces soirées passées à tenter de réveiller le prince alors qu’il était censé dormir à point fermé. Morphée aimait bien cette époque, c’était l’une des plus belles et des plus sécurisées de sa pauvre vie de mortelle maintenant rallongée par les gênes lupins présents en elle. La guerrière avait souvent maudit son éternité à venir, qui voudrait d’une vie si longue si elle vous condamnait à une solitude lassante et terriblement difficile à supporter ? Qui pourrait fermer les yeux en se disant que le lendemain, la personne qu’on aimait le plus au monde vieillirait, en viendrait même à passer dans l’au-delà alors que vous n’aviez même pas pris une ride ? Elle ne voulait pas de ces centaines d’années si c’était pour pleurer chaque jour le manque de cette personne.
Depuis son départ jusqu’à son retour, la jeune albinos n’avait cessé de penser à lui, ce pauvre blond aussi perdu que gentil. Ce petit homme qui se faisait malmener par un père violent et bien trop autoritaire avec lui. Elle s’était détestée de ne pas avoir pu l’arracher à cet univers, de ne pas avoir réussi à le protéger comme il le méritait. Mais, maintenant, tout avait changé. Elle était revenue, plus forte, plus sûr d’elle et surtout… Tellement plus libre. Mais… Il n’y avait pas qu’elle qui avait changé. Lui aussi. Tout le monde qu’elle s’était construite autour de leur retrouvaille, de l’idée qu’elle se faisait de cet homme, avait volé en éclat. Étonnement, cela ne l’avait pas tellement dérangé. Morphée l’avait enfin à ses côtés et ce qu’il était devenu s’accordait parfaitement avec ce qu’elle était. Deux âmes en perdition qui n’attendaient qu’un coup de vent pour se souder ensemble et avancer, l’un protégeant l’autre dans un accord parfait.
Et là, le fait de ne pas avoir été présente lorsque le plus gros de la bataille pour accompagner cet homme l’avait passablement énervée. D’ailleurs, le chef de la milice italienne devait s’en souvenir encore, son œil au beurre noir également. Cependant, personne n’avait pris la peine de lui préciser un détail fort important à ses yeux. L’amnésie de Charles. Elle était remontée le plus vite possible, n’hésitant pas à épuiser un ou deux chevaux, à se transformer malgré la douleur insupportable pour arriver au plus vite auprès de celui qui avait tellement longtemps hanté ses pensées. Les chaussures encore crottées, la robe salie par la route, les cheveux légèrement défaits, elle avait poussé la porte du château à la volée, entrant dans l’intimité matinale du roi avec un sans-gêne déconcertant. Elle s’était installée à sa table, le fixant de ses yeux si clairs. Il avait l’air fatigué. Et perdu. Morphée fronça les sourcils, sentant bien que quelque chose clochait. Puis, le blond lui révéla souffrir d’une amnésie visiblement tenace.
La jeune femme ouvrit la bouche légèrement avant de la refermer et de se pincer l’arête du nez. « Je savais que je n’aurais jamais dû vous laisser partir sans moi. » Elle poussa un léger soupire avant de lui sourire doucement, compréhensive et réellement désolée. Puis, la demoiselle reprit avec une voix plus douce et plus posée, se redressant sur son siège. « Vous souvenez-vous de qui je suis ? » Elle sous-entendait par-là l’enfant qu’elle fut jadis, la dualité de son apparence ou même les missions qu’elle faisait pour lui et qui n’avaient rien d’officiel. Morphée finit par se relever, attrapant la main du blond attablé pour le forcer à sortir de sa petite routine. C’était son truc avec lui, le bousculer, le mettre dans des situations qu’il ne maîtrisait pas mais qu’elle maintenait d’une main habile. « Venez, mon roi. Allons faire un tour, je vois bien que votre repas ressemble plus à une torture qu’à un réel plaisir. » Un nouveau sourire, plus doux encore, plus enfantin malgré tout et toujours aussi malicieux. « Il fait très bon dehors, allons dans les jardins. Si vous ne vous rappelez plus de moi, je vais vous raconter. Sans jugement, sans hypocrisie. » Des paroles débordant de sincérité, des yeux ne montrant aucune hésitation. Il devait se rappeler d’elle. Que ferait-elle, sinon ? Redeviendrait-elle cette pauvre gérante de maison close ? Serait-elle forcée d’oublier son rôle masculin ? Non. Morphée avait confiance en lui, une confiance aveugle, elle donnerait sa vie pour ce roi. Sa vie et bien plus encore.
Tout le monde faisait montre d’une profonde humilité et d’une politesse sans faille envers Charles. De son lever jusqu’à son coucher on l’assistait, on se portait vers lui pour lui prêter une main, une épaule sur laquelle il pourrait se reposer. Sauf que cela en devenait ridicule et étouffant par bien des aspects. Charles avait été blessé, il le savait bien. C’était là l’œuvre de la récente guerre entre la France et l’Angleterre. Il n’y pouvait plus grand-chose, désormais, d’autant plus qu’il ne possédait plus suffisamment de consistance au creux de son esprit pour réfléchir vraiment à toute cette situation malheureuse.
Pourtant, la tornade blanche qui lui adressait présentement la parole semblait différente par bien des aspects. Il ne remarqua que maintenant son air un peu différent de celui des dames de Cour qu’il fréquentait en général. Elle lui apparaissait plus… naturelle et bien moins guindée par es protocoles et des corsets de rigueur. Sans bien comprendre lui-même la raison de cette réaction, Charles se surprit à sourire. Il se laissa même entrainer dans le sillage de cette venteuse dame, aux allures d’une Calypso maudite. Intrigué par cette soudaine invitation – qui laissa les domestiques pantois – il choisit de ne pas se braquer et de se laisser porter par l’idée alors proposée. Une ballade dans les jardins ? Pourquoi pas ! Bien qu’il connaisse déjà bien les recoins de ses jardins, une sortie maintenant briserait la routine de ses journées. Et de cela, Charles ne pouvait être que ravi. Il défi cependant l’étreinte autour de son bras, ne se sentant pas suffisamment à l’aise avec ce corps qui ne cessait de lui renvoyer pique de douleur sur pique de douleur pour laisser quelqu’un se l’approprier de la sorte trop longtemps. Néanmoins, ses pas le firent suivre la nouvelle arrivante. L’état du chignon blanc de cette jeune femme appuya alors son hypothèse comme quoi elle n’avait sans doute pas grand-chose à voir avec le reste des jeunes filles ici présentes, près des plus beaux atours. « Je vous remercie de m’avoir tiré de cette situation. Vous aviez vu juste, je n’avais aucun appétit et cette mascarade n’amusait que peu. » Il lui offrit un sourire en coin.
Une question le tarauda cependant bien plus que les autres. Il craignait un peu la réaction de son homologue mais savait pertinemment qu’il valait mieux crever l’abcès dès le début au risque d’essuyer des quiprocos par la suite. « Pardonnez mon manque de souvenirs, ma dame, mais je suis encore dans le flou au sujet de votre nom. Me feriez-vous l’honneur de le déclamer pour moi ? Afin que je puisse m’adresser à vous correctement ? » Il ne se voyait pas agir comme un rustre avec celle qui venait de le tirer d’un délicat malaise.
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Sam 11 Nov - 15:38
Dans la lumière, une main t’atteint.
ft. Charles & Morphée ۰ Ex Cathedra.
Morphée n’était clairement pas une femme du monde, combien pouvait-elle faire d’efforts que cela ne servirait à rien, sa qualité d’enfant pauvre, de gérante de maison close apparaitrait immédiatement, revenant au galop comme si le monde ne voyait que ça. Il n’y avait que lorsqu’elle revêtait les habits de gentilhomme qu’elle se transformait en une véritable personne du beau monde qui entourait le roi de France. Malgré tout cela, la jeune femme aux cheveux blancs ne semblait pas s’en soucier. Elle avait connu ces regards tellement de fois, qu’ils ne pouvaient plus rien lui faire, tant qu’elle avait l’approbation de cet homme précis, de celle qui l’avait sauvé également. Ils étaient les seuls qui pouvaient avoir une influence sur sa manière d’être, sur son caractère pour le moins bien trempé. Finalement, l’honnêteté dont elle faisait preuve était ce qui manquait le plus à Charles et cette osmose entre eux était peut-être née de ça.
La belle le tira avec précaution tout de même jusqu’au jardin, finissant par le lâcher lorsqu’il désira se dégager de son étreinte quelque peu forcée tout de même. Elle lui fit un léger sourire d’excuse avant de s’arrêter devant un parterre quelque peu mal en point. La jeune femme attrapa un arrosoir laissé là, oublis du jardinier pour verser quelques gouttes d’eau sur les pauvres lys qui ne désiraient qu’un peu d’humidité pour s’épanouir. Lorsque Charles la remercia, Morphée ne put s’empêcher de lui rendre son sourire, haussant les épaules. « Il n’est pas bon de se forcer à faire une chose qui ne nous plait guère. Surtout dans votre état. On m’a dit que vous aviez été blessés lors de la bataille. Je suis désolée de ne pas avoir été présente. J’espère que vous ne m’en tiendrez pas trop rigueur… »
Même si cette mission était un ordre de la part du roi lui-même, la gérante continuait de s’en vouloir énormément. Elle aurait dû être à sa place, auprès de cet homme qu’elle estimait tant, prête à prendre les coups à sa place sans la moindre hésitation. Elle eut un mouvement d’arêt avant de soupirer et de continuer d’arroser les plantes, retirant quelques mauvaises herbes par la même occasion avant de reposer l’objet non loin de là où elle l’avait trouvé. Puis, entendant les nouvelles paroles de l’homme, elle fronça les sourcils avant de se retourner et de pencher la tête, retrouvant rapidement son sourire habituel. « Forcément, si vous ne vous souvenez pas de moi, vous ne devez plus connaître mon nom… Je m’appelle Morphée SaintBrieux. J’ai vécu ici, avec vous, il y a très longtemps, lorsque nous étions bien trop occupés à savoir quand nous allions goûter plutôt que de l’avenir du royaume de France. » Elle eut un léger haussement d’épaules avant de se diriger vers un banc de pierre non loin de là.
« Vous savez, Charles, je pense que vous devriez sortir un peu du château pour votre mémoire. On ne m’a pas dit grand-chose concernant votre blessure, je suis revenue aussi vite que possible d’Italie. » La belle eut un soupire profond avant de sourire à nouveau, vraiment triste, à son ami, les yeux rouges brillant légèrement. « Comment vous sentez-vous ? Ne me faites pas de beaux discours, mon roi, nous sommes amis, il n’y a pas besoin de faire attention avec moi. Surtout après la balafre que vous m’avez faite lors de nos retrouvailles. » Morphée désigna son visage, un léger rire passant de ses lèvres, signe qu’elle ne lui en voulait pas le moins du monde.
Depuis qu’il avait émergé de son sommeil troublé, de sa mémoire vacillante, Charles n’avait plus eu cette sensation de familiarité si prononcée, spontanée et naturelle avec qui que ce soit d’autre que Francis de Saint-Cloud. Mais le Duc était encore un cas à part ; rien à voir avec la belle dame à la chevelure de neige qu’il côtoyait alors. Il se sentit sourire alors qu’il écoutait la nymphe lui parler comme s’ils étaient des égaux, une seule et même forme d’existence. Cette impression lui fit se détendre, relâchant pour un temps du moins la tension qui avait marquée jusque-là ses épaules, sous le coup de l’incompréhension et de la surprise. Il n’avait pas encore énormément échangé avec elle mais déjà, le Roi se dit qu’il appréciait grandement cette personne. Il espérait pouvoir très vite retrouver la mémoire ; sans doute devait-elle être peinée qu’il ne l’eût point reconnu.
« Hum, enchanté de vous rencontrer… Une fois encore, dans ce cas, Morphée. Permettez que je vous alpague par votre prénom ? J’ai cru comprendre que les amis proches se présentaient ainsi les uns avec les autres. Et si je me fie à ce que vous venez de me délivrer comme précieuses informations, alors nous pouvons user de ce genre de langage entre non, n’est-ce pas ? » Il espérait une approbation ; mais un refus ne l’aurait pas gêné non plus. Ou peut-être juste un peu au début. Mais avant tout, Charles voulait comprendre et se souvenir. Alors, peut-être qu’en se comportant le plus naturellement du monde avec cette fameuse Morphée, il saurait quoi faire pour pallier au creux de son esprit.
Et puis, les affres de la guerre furent invoquées. Charles savait qu’il n’avait guère le choix de s’en draper s’il voulait comprendre un peu mieux ce qu’il s’était passé mais cela restait tout de même très déplaisant. « Oui, la guerre… D’après ce que l’on m’a rapporté, j’ai été vaincu aux portes de Londres et fais prisonnier. Ensuite, toujours d’après les dires de certains de mes sujets, j’aurai été ramené ici et torturé en place publique par des commandants des armées britanniques. Il semblerait qu’ils se soient pris pour ce qu’ils n’étaient pas puisque le couple royal d’Angleterre a fait mander des excuses à mon égard. » Il frissonna un instant, la douleur de son corps lui revenant toujours aux endroits où il avait été plus malmené que d’autre – après tout il avait maintenant le sigle royal anglais gravé au fer rouge dans les chaires de ses côtés gauches. « A vrai dire, je ne suis pas certain que je méritais réellement ces excuses… »
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