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L'appel du Sang - Chapitre Premier

Eckhard Draxler
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptySam 2 Sep - 1:50
Il était prévu que le voyage soit long. Traverser l’Europe du nord à l’Ouest, de la Prusse à la France plus précisément, était chose ardue en cette époque. S’il ne fallait que quelques jours en théorie, traverser les frontières n’était pas à portée de tous ; les tensions entre les différents royaumes ne facilitaient pas la tâche. Il fallait ruser, passer par les domaines de nobles les moins hostiles, et les plus enclins à laisser passer une troupe de vingt mercenaires. Souvent, il fallait moyenner un service : se débarrasser d’un groupe de bandits, ou payer un tribut soit à la garde, soit au noble lui même. Si les routes pratiquées par Eckhard et son groupe devaient être tracées sur sa carte, on ne verrait qu’un gribouillage labyrinthique, tant les détours seraient nombreux. De plus, il leur a fallu passer par l’Alsace, puis les montagnes en bordure de la Suisse, pour revenir sur le territoire français et rejoindre petit à petit leur destination.

Un peu plus d’un mois de voyage qu’il lavait épuisé, autant physiquement que mentalement. Car, pour économiser les frais, il avait dormi à la belle étoile toutes les nuits -celles où il n’avait pas poursuivi discrètement sa route- et commençait aujourd’hui à le regretter, tant son dos et ses jambes étaient ankylosés. Il regrettait autant de ne pas avoir pu prendre de vrais bains, les cours d’eau étant trop exposés, froids, ou troubles pour bien en profiter. Ses cheveux étaient en désordre, sa chemise commençait à souffrir, elle, d’avoir subi les diverses intempéries ; quant à sa barbe, elle devenait un peu broussailleuse par manque de taille. Il fut alors impératif de trouver une auberge de qualité pour s’y reposer confortablement, s’y soigner convenablement, et rejoindre le domaine cible de ce long voyage finalement.

Il eut besoin de se séparer de sa troupe, pour rejoindre le faubourg parisien avant de trouver un établissement digne de ce nom. Sa bourse, jusque là intacte, servirait enfin depuis le début du périple. Une chambre, spacieuse, des draps propres et un bain à l’eau chaude et aux huiles parfumées pour un peu d’or. Bien heureux, se disait-il, d’avoir conservé ses fonds ; coupable cependant de devoir laisser ses hommes occuper un bâtiment un peu miteux à quelques rues de là. Cependant, si vivre dans le luxe était pour eux la finalité de leurs efforts, il s’étaient jusque là contentés de vivre parmi les plus humbles populations. Eckhard avait choisi cette chambre, certes pour ses atouts, mais aussi pour porter un grand soin à lui-même, le rendez-vous qu’il avait fixé comme cause.

Plusieurs mois plus tôt, peu après l’attaque du duché de Schleswig, Eckhard avait envoyé un émissaire à la rencontre de la famille Thorn, avec la requête d’une rencontre à une date précise. La raison était aussi simple, qu’un tiers des troupes qui avaient donné l’assaut du manoir familial était d’origine française. Parmi eux, d’autres nationalités y figuraient, mais en portion moindre. Étrange, dès lors que les prussiens eux-mêmes étaient sous-représentés. La première piste de l’enquête menait donc à des soldats -ou  plutôt mercenaires- français, très probablement formés sur le royaume des Lys bleus. La famille Thorn, plus connue pour ses spiritueux d’une qualité exceptionnelle, était la première piste d’Echkard. Cette famille était aussi connue pour leur force militaire très performante, assignée à la protection de la famille royale de France. Ils auraient sans doute des informations sur des groupes paramilitaires anti-royalistes, ou indépendants.

A peine installé, Eckhard prit peine à nettoyer et brosser son attirail, avec la parcimonie d’un officier de l’armée. Ses bottes furent décrottées, brossées, et cirées. Idem pour sa ceinture, puis ses gants. Quant à sa lance, qu’il porterait comme une arme de parade, le manche reçu un lissage à la cire afin d’y étouffer toute éraflure, trace d’usure ou de décoloration du bois. La lame fut brossée à la paille de fer de la base à la pointe, pour enlever toute trace d’oxydation. Poncée, pour éliminer la moindre cassure du tranchant, et finalement soigneusement polie pour la doter du reflet d’une arme neuve au métal pur. Puis, une chemise en soie bleue, un pantalon blanc.
Mais pourquoi se préparer comme pour parader, dira-t-on. Car avant tout, Eckhard est un noble, venu jusqu’ici pour négocier les calices les plus prisés, et parmi les plus onéreux. Il omit donc, de préciser la condition réelle de sa présence à son hôte, de quoi lui valoir son hostilité probable. À moins d’une bonne palabre bienvenue.

Il se leva à l’aurore. Si ce n’était pour cette entrevue, il se serait bien volontiers laissé aller au gré de ce matelas si confortable. Il prit un nouveau bain, plus court, mais tout aussi insistant sur son hygiène, puis s’habilla. Tout bien apprêté, il fit une dernière vérification devant son miroir, avant de pester. Il n’aimait pas être aussi propret et lisse -cela lui rappelait à quel point la noblesse pouvait être vide derrière une belle toilette. Il enfila son grand manteau noir au col en fourrure de renard blanc en sortant de l’auberge, puis monta son cheval. La moitié de sa troupe l’attendait devant, prête à l’escorter jusqu’au domaine Thorn, comme tout bon noble.

Après quelques minutes, il arriva devant le domaine. Deux gardes lui barrèrent la route, très bien entraînés s’il en est, au regard de leur posture, et de leurs gestes simultanés et identiques. Eckhard présenta un parchemin, sur lequel il y figurait ce qui ferait office de laisser passer, ainsi qu’un sceau qu’ils reconnurent d’un coup d’œil. On lui saisi cependant sa lance et son épée courte, ce qu’il fit avec bonne volonté. Il ne lui restait plus qu’à rencontrer le chef de famille, et le défi serait alors lancé.
Belladona E. Thorn
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyMer 6 Sep - 20:14
HRP : je dois juste me relire encore !

La journée s’annonçait désolante, voir même pire, agaçante.
Comment était-elle censée se lever du bon pied quand l’une de ces misérables créatures qu’elle exécrait tant allait fouler le pas de son domaine ?

Peu importe sous quel angle elle l’étudiait, cette idée définitivement ne savait montrer une once de charme à ses yeux. Le seul intérêt de cette rencontre résidait en le fait d’y tisser de nouvelles relations pour continuer d’étendre le voile de pouvoir des Thorn. Une rencontre qui lui coutait au minimum un comportement courtois et qui ne tenait donc que d’une obligation dictée par son rang au sein de la famille. Si d’accoutumée elle se débrouillait pour esquiver habilement les tâches qui l’incommodaient, certaines d’entre-elles nécessitaient une présence qu’elle seule était amène d’apporter.

Bien qu’elle avait eu le temps d’étudier la requête de ce certain Draxler, Belladone ne s’était toujours pas faite à l’idée qu’elle se tiendrait face à lui. Bien sur avant d’organiser cette rencontre, elle avait fait quérir quelques de ses hommes pour se renseigner à son sujet, sans grand succès. Elle n’avait récolté pour toute informations que les plus banales de toutes. L’individu n’était pas originaire de France, ni établi dans une  résidence fixe et s’entourait d’une troupe douteuse plus ou moins habile au maniement des armes. Il laissait donc derrière lui non seulement un mystère quant à la vie qu’il menait, mais également sur les réelles intentions qu’il nourrissait à son égard.

Et de simples mots n’avaient guère de crédit au regard acéré de la Thorn. Pour autant elle ne le sous-estimerait pas. Elle savait les ennemis partout, et les moindres erreurs parfois fatales. Même le plus anodin des hommes pouvait être le plus ignoble de tous. Elle était bien placée pour le savoir et… dieu sait qu’il était difficile de ne pas succomber à la tentation du mépris facile. Malgré son jeune age elle l’avait apprit à ses dépends. Avec un peu de bon sens et de jugeote, il n’y avait guère besoin de plus d’expérience pour reproduire cette erreur. Aussi, il fallait avouer que depuis le jour funeste de sa naissance elle n’avait jamais réellement eu l’occasion d’en confronter d’aussi près aussi étrange que cela soit. Elle s’était toujours assuré que son cercle de connaissances n’en comportait aucun et ne tolérait aucune familiarité à leur égard. Définitivement pas.
Ce n’était que des brutes épaisses après tout, n’est-ce pas ? Cela ne pouvait qu’en être pour lui arracher ces  frissons d’horreur. Raison pour laquelle elle avait tout mis en œuvre pour éviter d’en rencontrer au cours de sa longue existence. Il n’y avait eu qu’une seule fois ou elle avait faillit à cette prévention et elle s’était conclue sur un demmêlé sanglant.

L’explication la plus plausible à cette échange outre ce devoir, n’était autre que personne de confiance n’avait pu se libérer pour accueillir son invité, pas un membre de la famille proche, pas un oncle, ni un cousin éloigné. Alors elle s’était résignée à le faire elle-même. Après tout c’était l’occasion rêvée pour en confronter un, et juger plus justement leur force qui n’étais pas légendaire. Il était temps qu’elle fasse un pas en avant.

Aujourd’hui elle verrait enfin de ses propres yeux ce ce qu’elle considérait comme des aberrations de la nature autrement que par un combat sanglant peu importe si elles étaient l’indélicatesse même de la vie, l’arrogance d’une sauvagerie prépondérée et l’insolence d’une race brutale à son regard. Elle passerait outre. Avec les années elle avait su apprendre à masquer ce que la jeunesse elle aurait laissé transparaitre.  Elle pourrait de la sorte se frotter à ce que d’une certaine façon elle avait toujours nié d’« égal » à « égal ». Une confrontation en bonne et dut forme qui la contraindrait à se comporter elle aussi comme quelqu’un de civilisé.

Les craignait-elle ? Non, néanmoins, il y avait au fond d’elle une appréhension amère qu’elle ne parvenait pas à apaiser. Une tension qui raidissait sa nuque alors même que Krystale resserrait vigoureusement les pans de son corset. Ce dernier enlaçait durement la courbe de ses reins, forçant une étreinte particulièrement cruelle au point qu’elle crispa ses doigts sur le rebord de l’âtre de marbre.

— Diable Krystale, ménagez-vous un peu !!! Ne put-elle que grogner entre ses dents.

Inspirant comme elle le faisait par réflexe depuis sa tendre enfance, elle ferma les yeux sous l’air désolé de la blonde qui s’afferait dans son dos, confondue en excuses. Bientôt moulée dans une robe aux ornements complexes et à multiples volant, Belladona se laissa choir sur un tabouret pour laisser la jeune femme terminer ses préparations, patiente malgré tout. Si cela ne tenait qu’à elle c’est les cheveux lâches et la chemise au vent qu’elle se serait présentée, sans plus ni moins, prête à conclure cette histoire en deux temps trois mouvements.

Pourquoi se serait-elle donné du mal pour une chose qui n’avait en dehors des besoins de famille aucune valeur ? Il ne fallait pas croire, on avait beau avoir le gout du faste, elle n’oublierait jamais les premières décennies de sa vie à n’être qu’une moins que rien au regard des autres. Ses racines n’avaient rien de noble peu importe si le sang qui coulait dans ses veines l’était. Dans ce milieu élitiste que celui de la noblesse, tout n’était qu’imposture et illusion. Ainsi, elle même n’était qu’un mirage, une attitude façonnée par les carcans de plusieurs vies.

Et un jour, elle regagnerait sa liberté elle aussi quand elle aurait enfin réussis à obtenir le pardon. Perdue dans ses pensées, elle ne vit plus le temps passer, le creux de son visage calé dans sa paume de main , jusqu’à ce que la douce voie de la servante ne vienne la tirer hors de ses songes.
— Voilà qui est fait. Vous êtes magnifique Madame ! S’exclama la jeune femme réjouie d’être parvenue à dresser la chevelure de la vampire en une coupe complexe qui dégageait sa nuque. Il ne manque plus que la dernière touche et vous serez parfaite !
Calice émit un sourire un peu plus détendu à sa remarque bien que crispée. Krystale semblait avoir progressé dans l’art de la coiffure au cours de ces derniers mois. Ses progrès étaient remarquables.
— Merci, si seulement Céleste était capable de faire quelque chose de ses doigts peut-être ne seriez-vous pas contrainte de vous battre avec mes cheveux pour tenter de leur donner de la forme.
Krystale lâcha un sourire gêné, peu habituée à ce que sa maitresse lui fasse un compliment sous-jacent.

La touche finale de cette tenue faite tout de noir et de rouge n’était autre qu’un épais collier ras le cou venu embrasser sa gorge, à la mode des femmes espagnoles dont les bijoux révélaient une exquise sensualité une fois portés.  Calice jeta un regard désabusé dans le miroir qui projetait son reflet pour constater qu’elle était plus que présentable pour son hôte. Une créature figée à la beauté de marbre, moulée dans une délicate parure faite tout de soie et de dentelle et dont les coutures savaient mettre en relief les courbes les plus charnelles de son corps. Un sourire sarcastique lui fut arraché à ce même moment ou un garde toqua pour entrer et l’informer de l’arrivée de son invité.

— Bien il est temps que je vienne l’accueillir comme il se doit. Vous pouvez disposer Krystale, je vous ferais quérir si j’ai besoin de vos services.

Profitant que l’humaine s’éclipsait Belladona donna ses derniers ordres à Céleste resté planté là puis quitta la pièce. Elle partit rejoindre son invité que les gardes avaient escorté jusqu’à un boudoir reculé de la demeure. On l’avait prié de bien vouloir patienter quelques instants le temps que la maitresse de maison fasse son apparition. Il n’eut d’ailleurs pas longtemps à attendre avant que cette dernière ne pousse les battant d’une porte adjacente pour s’annoncer.

Bon dieu, elle regrettait déjà ne pas être venue en tenue lâche. Tout ceci était absurde. Il était encore temps de reculer et de fuir ? Non, il était trop tard. Son regard écarlate avait croisé celui de la bête.

— Pardonnez moi pour cette brève attente Monsieur.


Elle inclina sa tête en guise de salut puis s’avança vers lui pour lui tendre sa main comme les exigences le demandaient non sans réprimer son envie de ne rien en faire. Elle en profita pour détailler l’individu qui se tenait sous ses yeux sans une gêne aucune.



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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyLun 11 Sep - 20:54
« Tu t’entêtes à tout tenter, tu t’uses et tu te tues à tant t’entêter », dit-il, d’une voix basse.

Eckhard patientait depuis quelques minutes à peine, dans un boudoir qui lui sembla se loger au cœur de la bâtisse. Bien qu’il soit en mesure de vanter sa maîtrise de pas moins de sept langues étrangères, il pratiquait calmement un fourchelangue français. Il répétait celui-ci particulièrement, pour sa disposition à lui tirer son accent allemand de la gorge. Des « t » plus secs, des « en » plus brefs, qui dans sa langue natale semble toutefois plus autoritaires en paradoxe de leur sonorité pour « coulante ». De sa tenue vestimentaire, jusqu’au langage, il tenait à laisser une image d’une propreté nette, qui lui attirerait -en l’espérant », les faveurs de son hôte. Son fourchelangue l’interpella quelque peu.

D’ailleurs, l’endroit était fort à propos. S’il devait s’agir de propreté, rien de cette pièce n’y échappait. Pas une trace sur le mobilier, les tapisseries ou le sol. Plusieurs fauteuils autour d’une table basse, un sofa plus loin, tous capitonnés dans ce qui semblait être du velours à vu d’œil, et ornés de dorures sophistiquées. Exactement le genre d’endroit qu’il tenait en horreur, tant il ne le voyait comme une démonstration de richesse et de bien-paraître. Et bien souvent il croisa des nobles pingres, prêts à renégocier ses contrats par manque de finances, avec d’aussi beaux meubles. Ce qui cependant ne semblait pas être le cas de son hôte du jour.

Il sortit la petite pièce dorée qu’il gardait en permanence sur lui. Cette pièce maudite, frappée d’un crâne vu de profil, portant une couronne à l’envers. Il ne savait toujours pas d’où elle venait, mais comprenait, en substance, ce qu’elle signifiait. Il se servit non pas de cette pièce pour garder en tête son objectif final, mais comme d’un petit diapason de fortune. Après s’être habitué l’oreille au son que le tapotement de cette dite pièce provoquait sur un mur, il se mit à longer les murs. Tous, un coup en haut, un coup en bas, puis un que chaque côté des tableaux. Jusque là, il n’y avait rien à signaler. Il ne se sentait peut-être pas totalement en sécurité, mais il était néanmoins un peu rassuré. Il devrait compter sur son ouïe fine de Loup pour tenter de remarquer la moindre anomalie.
Assis de façon assez relaxée sur un des fauteuils, il était à deux doigts de défaire son col et de s’offrir un peu d’air et de confort. Même s’il avait pu se reposer de façon plus que correcte, son corps réclamait encore un peu de repos. La poignée de la porte tourna.  Il passa sa main délicatement dans ses cheveux, afin de s’assurer qu’ils n’étaient pas trop en bataille, puis se leva quasiment aussi tôt, le buste droit, les mains croisées dans le dos, face à ladite porte.
Comme le crépuscule, vu de la cime d’une montagne au dessus de la couche nuageuse.
Sublime.
En un peu plus de trois cent ans d’existence, Eckhard eu bien plus que le temps de goûter à la chair, de côtoyer bon nombre de femmes ; vampires, louves et humaines confondues, et s’en alla parfois à s’enticher de quelques rares d’entre elles, sans pour autant s’abandonner à elles. Il n’avait cependant jamais rencontré de femme comme celle-ci. La finesse de ses traits, son visage délicat et ses lèvres diablement tentantes comme le Fruit Défendu. Sa peau ne souffrait d’aucun défaut, et exprimait une douceur sans même y avoir glissé la main. Sa posture était elle aussi contributrice à son image : droite, fière et sûre d’elle. Même la froideur et la tempérance qu’elle dégageait semblait lui aller à la perfection.
Assez paradoxalement, cette froideur était mise en valeur par une robe finement travaillée des plus agréables au regard. Deux tissus de haute gamme, rouge et noir, qui s’entrelaçaient à merveille dans ses jupons, et qui se soutenaient l’un l’autre sous le corset, et les manches. De fines dorures venaient s’immiscer ça et là, accentuant la qualité et l’onérosité de la robe ; et pour couronner le tout, une coiffure haute, laissant tout le loisir de s’exprimer à un ras-de-cou épais. Comble de ces atours attisant la passion des hommes, pour un visage si imperturbable. Ses deux yeux de rubis le fixèrent, il se laissa aller à un très léger sourire charmé, mais néanmoins avec mesure.

Avant de lui répondre, il s’attela à ses devoirs de salutation, à la française. Il prit délicatement la main de son hôte, et pencha à peine sa tête et son échine  pour tenir son visage juste au dessus, sans y porter de baiser. Selon la tradition, il faut  se pencher assez profondément, pour ne pas avoir à lever la main de la Dame  ; en France, il ne faut pas non plus porter de baiser, uniquement s’il y a demande de mariage. Intérieurement, cette idée le fit rire, mais il ne broncha pas.
Il se redressa doucement, puis maintint le regard rubis de la belle.

« Je vous en prie, je vous suis redevable de bien m’accepter sous votre toit, madame. »

Il remit ses mains dans son dos, dans une posture toute aussi droite, témoignant de son expérience militaire, et de ses classes d’officier -poste qu’il n’occupa jamais mais dont il avait gardé la rigueur. Son regard resta doux, et son expression se fit impassible, lorsqu’il la surprit cependant à le détailler du regard. Cette femme était sans gêne, et il aurait pu pester, s’il n’avait pas besoin de garder son flegme pour affaires. Il sentait un certain dédain venant d’elle, qu’il empressa d’oublier en lançant la discussion.

« C’est un véritable honneur de vous rencontrer. Loin de moi l’idée de flatterie éhontée, de blandices, mais que vous receviez une aussi humble personne que moi même me ravit, et vient louanger votre bonté. Je ne veux cependant pas empiéter sur votre emploi du temps, certainement chargé, parlons affaires si vous le voulez bien.  »

Après y avoir été invité, il prit place sur l’un des fauteuils du salon. Il s’y enfonça, le dos droit épousant à merveille l’angle assez droit du dossier. Il vient placer ses longs bras sur la longueur des accoudoirs, avant d’en saisir les bouts de ses mains.

« Vous n’êtes pas sans savoir que certains d’entre nous, à défaut de nous en nourrir, chassons l’humain pour la saveur de leur sang. Je suis las, à vrai dire, de les chasser. Voyez-vous, en Prusse, la chasse intensive a poussé grand nombre d’entre eux à mieux se préparer. Je viens à vous, pour m’éviter ce désagrément, tout en satisfaisant mon besoin. Mon désir de qualité passe donc par vous, plutôt que les marchés parallèles à l’approvisionnement douteux. »
Belladona E. Thorn
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyLun 18 Sep - 22:35

Ses yeux s’étaient posés sur la silhouette silencieux, et pourtant bavards dans leur contemplation. L’oeil détaillait les moindres formes comme l’on étudiait une bête curieuse, suivant les plis de sa toilette à la plus petite froissure ses tissus. La posture adoptée par l’homme avait également quelque chose de “noble” qui ne laissait pas penser qu’il avait été éduqué dans un milieu sans moyens. Droit dans sa posture, solide sur ses jambes, et propre sur lui, rien ne laissait transparaitre sa nature lupine outre cette odeur toute particulière qui bientôt s’immisça jusque dans ses narines, pleine et puissante. Lui arrachant ce frisson étrange. Et c’est ce qui surprit le plus la maitresse de maison. Il était stupide et sot d’imaginer qu’un lycan était sauvage d’esprit parce que sa nature tenait plus de l’animal que d’autre chose, et pourtant elle aurait aimé que ça soit le cas.

Réprimant une grimaçe lorsqu’il se pencha en avant pour répondre aux exigences de bienséance elle tenta tant bien que mal de ne pas afficher son mépris. Plus encore maintenant qu’elle put constater d’aussi près que l’un d’entre eux pouvait non seulement se montrer charmant mais également être doté d’une si jolie enveloppe. Agacée par sa proximité et le simple fait de devoir se trouver en ces lieux en sa compagnie, la jeune femme ne perdit guère de sa stature quand elle l’invita à prendre place sur un fauteuil. Prenant place dans un siège voisin au sien elle désigna d’un geste de main le plateau fumant qui avait été déposé tantôt par un domestique sur la table. Elle avait veillé à ce qu’on y dépose une boisson chaude encore fumante et quelques entremets pour mettre à son aise son invité. Non pas qu’elle n’ai pas songé un instant à y glisser du poison mais définitivement elle désirait, dans une juste mesure, tenir cet entretient.
— Tenez ce n’est pas grand chose mais, cela devrait vous être une mise en bouche agréable avant que nous n’entrions dans le vif du sujet.
Le plateau ne comportait néanmoins qu’une tasse fumante. Elle n’avait guère d’appétit. Ou du moins, pas pour ce genre de nourriture là. À la réflexion il y avait fort longtemps qu’elle n’avait plus bu à la gorge d’un humain, elle non plus. Ses désirs réprimés passaient sous silence, surpassés par un une détermination à aller au delà de toute dépendance à quoi que ce soit. Pourtant, sa gorge parfois sèche et la faiblesse qu'elle se découvrait aurait du alerter ses sens. À ses excuses parsemées de gentillesse elle souffla.
— Nous rediscuterons de ma bonté après nos échanges, Monsieur.
Peu habituée à se laisser flatter par des paroles qui passaient pour trop sincères Belladona s’interrogea sur les réelles intentions du brun. En effet s’il exprimait clairement un désir de satisfaire ses besoins de lycans elle savait également que la raison de sa venue était toute autre.
— N’allez pas me dire que c’est la réputation de ma famille et de ses services quelques peu… spéciaux qui vous a mené jusque dans mon antre, même si je serais flattée de l’apprendre. J’aimerais connaitre la réelle raison à votre présence ici, n’est-il pas ? Je puis vous promettre que si cet échange se montre satisfaisant qu’il sera récompensé de quoi sustenter votre appétit et vos besoins de bête avec les meilleurs cépages que l’on possède.

Sincère son sourire se fit aiguisé sous ses lèvres charnues. Il est vrai que si pour le moment son hospitalité pouvait être palpable, tout le côté carnassier qui le secondait passait sous silence. Et, elle ne perdait pas de vue son objectif premier. Si déjà elle s’était donnée de la peine pour cet entretient, il fallait bien qu’elle y ai un intérêt, qui serait-elle autrement pour accueillir un tel homme sous son toit ? Certainement pas Belladone Thorn. Toutefois elle saurait œuvrer de gentillesse car il était évident que si elle dépassait les limites de son hôte prendrait congé d’elle ce qui était contreproductif à ses desseins.

Alors, que voulait-il ? La ferait-il languir plus longtemps ? Pourtant elle n’avait guère de patience, Belladone, sous son air sage et reposé. Ses yeux pourpres brûlaient, pressant l’homme de satisfaire sa curiosité rapidement. Qu’est-ce qui l’avait donc poussé à voyager jusqu’en France ? Que faisait-il ici et qu’attendait-il d’elle ? Et si elle détenait un certain nombre d’informations capable d’y répondre elle attendait tout naturellement d’entendre les explications de sa propre bouche. Désireuse de mieux cerner l’animal sous ses yeux aux airs si civilisés elle voulait savoir s’il saurait se montrer sincère ou s’il omettrait de quelconques détails, s’il serait hasardeux, téméraire ou peureux, pour en apprivoiser le reflet. Tendue sur son siège, figée telle une statue de marbre elle vint caler son dos dans le moelleux du siège qui la portait, levant une jambe par dessus l’autre sous sa robe, imperturbable. Inhumaine.

Elle avait tout son temps. Ou presque.

L'air empestait.


Eckhard Draxler
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyMar 19 Sep - 3:40
Eckhard se mit à rire doucement, en penchant la tête sur un côté, et en ramenant sa main vers son menton, le doigt en oblique devant sa bouche. Il aurait dû s’en douter plus tôt ; elle avait du mandater un espion, un informateur pour le faire surveiller ou ne serait-ce que d’enquêter sur lui. Le simple fait que les informations à son sujet soient si parcimonieuses était à son avantage dans la plupart des cas -dans celui-ci malheureusement, il en était desservi. Il était trop suspicieux pour être écouté comme quelqu’un de digne de confiance dans un échange pareil. Il se pencha légèrement, assez pour avoir la tasse à portée de main. Il souffla doucement dessus, puis en inspira l’arôme. Le parfum était proche de l’hypocras, du miel, de la cannelle, quelques épices aromatiques. La base était une liqueur chaude, ou un vin blanc aux allures douces.
Sentant ses nerfs touchés, il ferma les yeux en buvant, feintant l’appréciation de son apéritif. En réalité, s’il avait gardé les yeux ouverts, ses pupilles se seraient embrasées d’ambre bordées de tourbillons magmatiques. Comme toutes les autres nobles, plus le visage est beau, plus la robe est chère, plus venimeuse est la vipère qui s’y cache. Mais il se devait de garder son calme. Même s’il avait accumulé près de quarante cinq victimes à lui seul et en une nuit quelques mois auparavant, il savait qu’il ne s’en sortirait pas s’il entreprenait à obtenir ses informations par la force. Il inspira un coup, but une autre gorgée. Il sourit doucement, en coin, en regardant Belladone.

« Besoins de bête, voyez-vous donc. Votre sourire n’a d’égal que votre condescendance, et votre impudence… vampire. Mais soit. » dit-il, prenant le soin d’enchaîner avant qu’elle ne réponde.

À son attitude altière, il répondait avec du dédain, sans même lui rendre la faveur de l’échange. Éviter d’encaisser une nouvelle pique l’aiderait à garder son calme un peu plus longtemps, et à ne pas briser son image de noble qu’il a tant travaillé à perfectionner lors de -trop- nombreuses leçons de bienséance dans sa jeunesse. Belladone, elle, était l’incarnation de ces codes qui l’avaient éloigné pour de bon des bals dansants, fêtes mondaines et des artifices de la cour. Il tenait face à lui ce qui le repoussait le plus, pourtant il n’arrivait pas à se défaire de ses charmes et atours. D’autant plus agaçant.
De sa main droite, il récupéra du fond de sa poche la « pièce maudite ». Cette pièce d’or frappée d’un crane couronné sur la face. Cette pièce, comme seule pièce d’un puzzle encore trop vaste et déconcertant pour aspirer à y trouver un sens. Du pouce il l’envoya en l’air, puis la rattrapa entre son auriculaire et son annulaire droit, et la fit habilement rouler jusqu’à la coincer entre son pouce et son index. Non pas par esprit de fanfaronnade, mais simplement parce qu’il était toujours aussi absorbé dans ses pensées chaque fois qu’il la voyait. Il posa le coude sur l’accoudoir, le bras légèrement en diagonale vers Belladone, sans pour autant croiser son regard. Le sien, d’ailleurs, était grave, sévère, et perplexe. Il tenait la pièce de façon à ce que le crâne soit tourné vers elle.

« Vous êtes assignés à la protection du Roi Charles de France, et de facto, à son royaume. Ce groupuscule, semble-t-il, tente de renverser le règne des Nobles d’Europe. Je ne sais presque rien d’eux, si ce n’est qu’ils sont idéalistes, des soit-disant détenteurs de la bien-pensance. Qu’ils sont faibles, ou invisibles, qu’ils n’ont que peu frappé, mais toujours avec violence. Votre statut, vos réseaux de renseignement. J’en ai besoin. Et bien que cela m’exècre, par delà vos manières ô combien stupidement hautaines, j’ai besoin de vous, Belladone Thorn. »

Eckhard tourna alors ses yeux vers elle. Il lui envoya la pièce, d’une petite chiquenaude du pouce droit vers les mains. Il se pencha en avant, avant de délacer le nœud de sa chemise au niveau du premier passant. Il ramena ses coudes sur ses cuisses, bras presque ballants vers le sol, dos voûté comme un prédateur. Ce prédateur qu’il était, car embarqué dans une longue traque depuis quelques temps déjà. Quid de cette fière allure de noble maintenue jusque là ? Nul besoin lorsqu’on joue cartes sur table.

« Réfléchissez bien, madame. Vous n’avez aucune raison de refuser. Ma proposition est simple : je vous transmets la moindre information nouvelle, et je vous débarrasse d’eux si d’aventure je les retrouve sur le royaume de votre bon Charles. »
Belladona E. Thorn
Belladona E. Thorn
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyMer 20 Sep - 17:50


Tout ceci n'était qu'une formalité mais une formalité qu'ils étaient tenus de respecter l'un l'autre, figés dans ces rôles respectifs d'inconnus à titre et que Belladone -au fond- exécrait toujours autant. Même si elle avait apprit à faire avec ces conventions, à les adopter pour se faire la parfaite nobliale de la famille que l'on avait dressé. Façonnée par cette lignée elle-même, sculptée par le déshonneur, endurcie par le rejet mais néanmoins étoffée par ces conventions. Empoisonnée par le sang noble qui coulait dans ses veines. Celui même que ses parents avaient partagé et qu’elle faisait désormais gouter à son hôte sans pudeur. Elle était le parfait alliage de son père et de sa mère réunis. Une allure enjôleuse à en damner le plus Saint, de sulfureuses courbes faites pour accrocher le regard héritées de sa sublime mère, et un caractère aussi froid et méprisant que le fameux maitre d’arme Thorn, son époux.

Un fruit pourris à l'allure enchanteur, tombé tout droit d'un arbre aux racines gangrenées. Quelle ironie quand l’on savait que la personne qui se dressait à la cime de cette haute lignée ancestrale à présent n’était autre que l’enfant dédaigné que l’on avait condamné plus tôt.

Aujourd’hui, c’est ce que cet homme avait sous ses yeux. Un phœnix flamboyant né des cendres de son âme, qui déployait ses ailes spectrales, son regard devenu celui d’une créature astrale. Elle était l’incarnation de ce cauchemar tentateur, baignée des sombres échos d’une abyme plus noire que les ténèbres. Un oiseau de malheur couleur d’ébène portant la malédiction de sa race, dont le plumage recouvrait une peau d’écailles sombres. Sur son cou subtile comme une preuve de sa véritable origine demeuraient toujours ces fines cicatrices que plus jamais l'immortalité n'effacerait, et qui ne cessaient de lui rappeler combien il suffisait d'un rien si volonté en était pour retourner au néant d'où l'on venait.

Un néant lointain et pourtant si proche, fuyant l'immortalité et tantôt la frôlant.

Et en parlant de choses incandescentes. Le 'sieur Draxler ne se montrait-il pas un tantinet susceptible ? Elle émit un sourire en coin lorsqu'il s'agaça de ses paroles outrageantes revenant à elle à sa réponse offensive. Elle lui concédait volontiers ses propos, n'ayant en aucun cas cherché à s’en cacher. Beaucoup de gens s'accordaient exprimer leur profond dégout à son égard lorsqu’ils réalisaient trop tard, qui se tenait devant eux.

Le loup quant à lui se montrerait-il à la “hauteur” des siens ? Honorerait-il cette réputation sauvage qu’on leur prêtait dans les comtes ? Elle remarquerait bien assez tôt quelle serait sa nature la plus prépondérante. En attendant elle savourait ces fragrances d'agacement qu'elle lui notait dans la voix et les quelques gestes de son corps.

Si ses mots passaient pour provocateurs et qu'effectivement ils recelaient un fond de vérité, ils ne dévoilaient que les simples pensées qui l’animaient, manquant cruellement de tact. Personne ne lui avait apprit lisser sa verve, ni à polir ces facettes acérées sur lesquelles on s’écorchait. Attentive, mais pas moins pensive elle laissa l’homme profiter d’un instant de silence pour sortir une pièce. Si elle paraissait anodine très vite  -aux regard de son air pensif- il lui parut évident qu’elle était reliée à la raison de sa venue. Elle suivit du regard ces quelques jeux de doigts sur l’objet se doutant qu’il murissait ses mots, l’air tout à coup plus grave. Ce détail ne manqua pas d’intriguer la Thorn qui se demanda s’il était impliqué de manière personnelle à cette affaire. C’était probablement le cas.

Et lorsque enfin il lui fit part de ses réelles intentions le sujet se révéla être bien plus épineux et perplexe qu’elle ne l’aurait cru. Il venait de porter entre ses doigts une nouvelle fort contrariante. Une énigme, un ennemi silencieux qui ne manqua pas de lever le voile sur d'éventuels dangers bien moins anodins. De qui parlait-il ? Qui était ce groupe dont il lui peignait le tableau ? Froissant ces délicats sourcils sous cette nouvelle pour le moins particulière la jeune femme se mit à réfléchir. Silencieuse.

Devait-elle accepter de lui apporter son aide ? Devait-elle tenter le coup en sachant que cela pouvait également être un guet append ? Devait-elle se donner la peine de répondre favorablement à cette requête au nom de Charles ? Il en allait de son devoir et le regard insistant de l’homme qui avait terminé en insistant sur la nécessité de son aide la convinrent de céder.

— J’imagine que vous ou vos intérêts ont été touché par ce groupe à moins que l’on vous ai payé pour que vous les poursuiviez jusqu’aux confins de notre chère France depuis votre terre natale.

En pleine réflexion Bella détourna le regard lorsqu’il lui envoya la pièce. Elle réceptionna cette dernière d’un geste habile, puis déplia ses doigts pour détailler l’objet.  La pièce était frappée d’une insigne méconnue, elle détailla les reliefs de cette dernière dont le crâne qui l’ornait. Elle avait beau fouiller sa mémoire pas nom ne lui revint en tête.

— Est-ce là votre seul indice les concernant ? Permettez-moi de vous dire que vous chassez une chimère. Je crains que la tâche ne se révélè ardue. Elle nécessiterait un travail de recherches pointilleuses. Néanmoins, je dois admettre -si vous dites juste- qu’il serait judicieux de mener une enquête approfondie à ce sujet.

Elle ignora la manière dont il dénoua légèrement sa chemise ainsi que cette façon de prendre ses aises, impassible. Seul son regard le défiait durant plusieurs minutes sans qu’elle ne se prononce. Il est vrai que le marché était intéressant, mais… Devait-elle vraiment lui céder ? Sa fierté lui criait de refuser, de ne pas s’encanailler avec l’une de créatures repoussantes et insultantes. Sa conscience lui susurrait de ne pas se mêler à la souillure là où son devoir exigeait d’elle qu’elle cède. Durant tout ce temps où ses yeux écarlates restèrent sur l’homme, elle mena une lutte silencieuse contre les ressentis qu’il lui inspirait. Puis finalement après une inspiration qui ne se suivit pas d’un souffle, elle se résigna, cédant à la demande du brun.

— Soit, je vous chaperonnerais dans vos recherches à la condition que vous preniez avec vous et votre troupe quelques de mes hommes qui devront vous accompagner. Je vous demanderais également de me tenir informée de vos avancées et de me faire part de vos actions. Je n’aime pas savoir…. De viles faquins prit de grandes espérance aussi faibles soient-ils. Vous avez réussis à piquer ma curiosité à vif.


Dédaignant l’idée elle se releva lentement.

— Nous sommes donc amenés à être partenaires et pour sceller notre accord je vous invite à me suivre dans nos suites pour trouver votre bonheur à la gorge de l’une de nos fleurs.

Fermant ses yeux elle lui lança un regard noir, en colère. Il pouvait toujours refuser. Il pouvait toujours quitter les lieux. Disparaitre et ne plus jamais montrer sa face. Cela l’aurait arrangée. Pourquoi ? Peut-être à cause de la chaleur qui émanait de lui avec tant de force. Peut-être aussi à cause de cette odeur de musc qui recouvrait sa peau et qui ne cessait depuis le moment où elle avait posé les yeux sur lui de la provoquer. Autant que cette manière nonchalante de la dévisager du regard.

Mécréant.

Eckhard Draxler
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyJeu 21 Sep - 3:56
Il avait brossé la vérité, sans pour autant mentir. Il avait étalé les bénéfices que tireraient le royaume de France dans une quête qui lui serait surtout bénéfique à lui. La paix du Duché de Schleswig avait été brutalement ébranlée, sa propre paix intérieure avait montrée à quel point elle était fragile. Parfois, en se replongeant dans ses pensées, en regardant la pièce d’or, il sentait un magma bouillir au fin fond de son torse, qu’il placerait juste entre ses poumons bien enfoui dans sa chair. Comme une énergie prête à jaillir, prête à écraser le moindre obstacle sur sa route ; comme il l’avait sentie jaillir lorsqu’il tua.
Belladone avait failli toucher juste quand elle mentionna la probabilité que ces hommes aient touché à ses « intérêts », avant de soumettre l’idée qu’il avait été payé pour les traquer. Elle s’éloigna bien loin de ses motivations aussi vite qu’elle en avait approché. Elle n’imaginait pas à quel point tout ceci était important.

Eckhard se passa doucement les mains sur le visage. Point d’anxiété, même si elle semblait dubitative. Qu’elle ne puisse l’aider ou non n’était pas le problème. Qu’elle s’y refuse en était un autre. Qu’elle ne puisse l’aider le pousserait à devoir chercher plus longtemps, à perdre du temps et à lui faire reprendre l’enquête dès le début. Qu’elle refuse de l’aider signifierait qu’elle n’ait aucunement envie de partager ses informations avec un inconnu. Toutes les possibilités tournoyaient et fusaient dans sa tête, pendant les quelques secondes où elle prit sa décision. Certaines, allant même jusqu’à lui faire arracher les indices de ses jolies lèvres pulpeuses. Il savait pertinemment qu’il chassait un fantôme. Il lui fallait au moins pouvoir se représenter une menace à nouveau tangible, comme au duché.

Elle finit par répondre par l’affirmative. Compter sur les Thorn presque comme des alliés l’aiderait grandement dans sa tâche ; leurs réseaux étaient suffisamment importants pour que les recherches portent leurs fruits assez rapidement. C’était un grand soulagement pour lui de l’apprendre. Elle avait prit une menace pour le moins éthérée dans les faits -de son point de vue- suffisamment au sérieux pour y accorder de l’attention et des moyens. Les conditions étaient simples, et faciles à accepter, si bien qu’il acquiesça sans un mot. Transmettre des rapports détaillés au moindre avancement de l’enquête, et se faire accompagner par des soldats expérimentés ne représentait aucun problème à son égard. Ce serait même bénéfique d’avoir des lames de ce niveau sous ses ordres, si tant est que lesdits soldats acceptent ce devoir sans sourciller.

« Vous faites le bon choix, madame. Cet accord n’en sera que bénéfice sans contrepartie. Je veillerai à ce que nous ayons de bons et prompts résultats. »

Puis, ce soulagement s’effaça devant les paroles de Belladone. Il devait encore passer par cette foutue transaction. Il était venu prétextant la volonté d’acheter un Calice. Et il faudrait encore s’y soumettre pour « sceller  leur accord » selon ses propres mots. Cette simple pensée lui était abjecte. Il avait prit goût au sang, c’est vrai, mais pas comme ça. Pas « ce sang » qui attend sagement d’être puisé. Celui des champs de bataille, des odeurs d’acier, de goût léger d’une simple goutte qui vient à la rencontre de vos lèvres après s’être faite arracher par une lame, celui qui hurle de terreur de peur de mourir. Ce sang là.
Chasser des innocents dans la rue ou sur les traces de forêt était bien loin de ce qu’il aimait, et il trouvait même injuste qu’on puisse ôter une vie qui ne demande qu’à en rester une. Les Calices étaient des prisonniers. Des esclaves, aussi raffinés soient-ils, enchaînés au bon vouloir et aux désirs de leurs maîtres. Une perversion sans nom, pour Eckhard. Et pourtant, il devait se forcer à tolérer ces pratiques sur ce domaine. À tolérer les pratiques d’une famille dont il avait besoin. Et s’il était prêt à ce sacrifice, il le resterait s’il pouvait s’éviter ça.
Pourtant, il acquiesça, et prit le pas de Belladone.

« Après vous, madame. J’ai hâte de découvrir les talents des Thorn. »

Il se dégoûtait, derrière son sourire de marchand avare. Il avait l’impression de mettre les pieds dans un monde plus cruel qu’un champ de bataille. Celui ou mettre sa morale de côté vous permettrait d’atteindre vos objectifs, où piétiner ses valeurs était la monnaie d’échange contre la puissance politique. Il serra fermement le poing dans son dos, tout en suivant Belladone dans les couloirs de la bâtisse, réfléchissant à un moyen de s’éviter cette purge sans froisser son hôte. Puis, une idée lui traversa l’esprit. Il continua de la suivre à travers les couloirs de la villa.

« Permettez-moi de vous poser la question, madame, mais au-delà de la dégustation, j’ose supposer que ce Calice sera en ma possession ? Je suis plutôt de ceux qui préfèrent l’intimité dans ce genre de pratique. »

Il pouvait tout simplement jouer cette carte là. Celle, ou il se garderait ce petit plaisir pour un moment bien plus solitaire. Un moment où il ne serait pas sous le toit d’une famille qu’il honnirait. Un moment où Belladone ne serait pas debout là, aussi proche de lui. D’ailleurs…
Un détail venait de lui sauter à la figure. Quelque chose qu’il n’avait pas remarqué la première fois qu’il l’avait vue, probablement subjugué par sa douce beauté. Peut-être le remarquait-il maintenant qu’elle l’ait refroidi par son ton acerbe et sa froideur dans ses échanges verbaux -non pas qu’il la trouvait moins belle pour autant, ou peut-être était-ce parce qu’il se tenait plus proche d’elle qu’auparavant. Une cicatrice. Une marque très rare pour un vampire. Pour un Loup, à moins que la blessure ne soit très grave. Alors, pourquoi ? Son regard resta fixé longuement dessus, à mesure qu’il avançait dans les couloirs.
Belladona E. Thorn
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyVen 22 Sep - 16:17


Il avait hâte de gouter ses talents hm ?
Pourtant il ne les méritait pas.

Alors même qu’elle l’entrainait dans les couloirs de la bâtisse pour retrouver des quartiers reculés des lieux, la jeune femme sentit le regard de l’homme peser dans son dos. Fixe.  Que diable. Sans même le voir elle le savait qui se tenait juste là à couler son regard sur sa silhouette et le simple fait de ne pouvoir le surveiller achevait de l’irriter. Elle aurait aimé être celle qui le faisait avancer, celle qui surveillait, hors elle devait être celle qui menait. S’il esquissait un geste dans son dos elle ne pouvait donc que le deviner. Et… Elle était loin d’imaginer que c’était cette grande cicatrice aux reflets de givres ivoire déployée sur la peau de son cou et qui s’étendait sur ses épaules qui attirait son regard.

À sa question néanmoins elle avait tourné la tête par dessus son épaule, secouée d’un rire limpide. Pour qui la prenait-il ? On voyait réellement qu’il ne connaissait pas l’ombre de l’influence de sa famille. Sans ce marché débauché qui seraient-ils si ce n’est de simple serviteurs du bon roi de France ? Personne. Et les Thorns, plus qu’une autre famille faisaient parti des FANTAST. Une origine pas des moindres.
Elle lui lança un regard pour le moins explicite. .

— Qui serions-nous si nous ne serions même pas capable d’offrir, un peu d’intimité à nos « amis » de tous horizons ? Vous ferez ce que bon vous semble, personne ne vous dira comment cela fonctionne. Que ce calice ne soit qu’en votre possession pour une nuit ou plus, vous aurez tout ce dont vous avez besoin à disposition. À moins que vous n’ayez jamais eu de Calice, vous autres les loups ? Qu’en sais-je après tout.

Plus ils avançaient pour s’enfoncer loin dans la bâtisse, plus les couloirs lumineux de la demeure cédaient au profit de dédales sombres éclairées de faibles lueurs. Après un escalier alambiqué ils arrivèrent aux sous-sol tamisés où luisaient d’un faible feu de nombreux cierges, quand les tapisseries elles offraient plus de sensualité. Quelques domestiques sur leur passage s’inclinèrent sans s’attarder, Belladone arrêta l’un d'eux pour lui donner ses ordres puis reprit son chemin. Parfois au travers des portes l’on pouvait entendre les gémissements de plaisir évident des inconnus venu se repaître en ces lieux, laissant sans mal l’esprit s’imaginer quels plaisirs ils tiraient de leur chambre. Dans ce silence ambiant bercé par ces échos feutrés, un homme émergea de l’une d’entre elles, laissant apparaître son faciès de toute beauté, typiquement vampirique. S’essuyant encore le coin de lèvre du bout du pouce il s’étonna de croiser la Thorn et vint à sa rencontre.
— Madame, c’est un honneur de vous revoir.
— Monsieur, j’ose espérer que vous avez toujours autant apprécié nos services.

Elle prit soin de ne pas révéler de l’homme qui n’était autre que le Duc de Castillac.
— Oh vous n’imaginez pas combien susurra-il en lançant un bref regard vers la silhouette de l’homme dans le dos de la femme.
Probablement venu se sustenter lui aussi, pourtant il fut surprit de voir que la Dame tenait dans son dos ce genre de créature. Voyant qu’elle attendait qu’il prenne congé et ne pouvant se permettre de la déranger il saisissait délicatement sa main pour y déposer un baiser.
Sur ce… Je suis au regret de devoir vous quitter. À très bientôt prenez soin de vous très chère, Monsieur.
Belladona acquiesça, lui rendant la faveur d’un sourire entendu qui se passait de paroles. Quelques pas plus loin elle stoppa sa route pour faire entrer son invité dans une pièce tamisée où des senteurs envoutantes se laissaient consumer à la tige de bâton d'encens importé d'Orient. Les lieux toujours aussi sensuels étaient éclairés par plusieurs chandeliers. De nombreux coussins étaient disposés sur les divans et les lieux décorés avec soin.

À ce moment précis, elle se sentit obligée de lui expliquer quelques détails au sujet des services dont il profiterait sous peu car elle venait de lui faire pénétrer les coulisses d’un monde qui lui aussi avait ses règles. Des règles qu’imposait sa famille. Et qu’il devrait respecter. S’il en était seulement capable.

— Ici, peu importe qui vous êtes et d’où vous venez, votre identité, n’a guère d’importance. Soyez mon allié, mon invité, ou juste présent pour affaire vous serez le bienvenu dans ces lieux de plaisir tant que vous en respecterez les règles.  Vous apprendrez  que le silence est d’or et à moins que vous ne souhaitiez en payer le prix fort, mes hommes savent toujours retrouver les traitres qui ont bafoués les clauses de nos échanges.

Il est de notre devoir de préserver cette intimité dont vous parliez plus tôt. Nous sommes tous tenus par le silence car ces lieux réunissent de nombreux identités désireuses de.. pouvoir assouvir leurs penchants en toute quiétude.


Elle émit une pause et lui tourna le dos pour se servir une coupe histoire de calmer la brûlure de sa gorge devenue plus vive qu’auparavant encore. Désireuse de chasser la fragrance qui lui restait dans le nez elle se dirigea vers une commode d'acajou ou trônait une bouteille de vin et quelques verres. Ils étaient seuls à présent. Seuls dans le silence ambiant. Et elle avait encore la sensation de son regard posé sur elle.

— Un verre de vin peut-être ?
articula-elle.

Déjà plus détendue du fait que le principal sujet de discussion ai été abordé précédemment la femme prit entre ses doigts son verre pour le déposer sur la table du petit salon et également celui du concerné si souhaité. Pas moins sur ses gardes. Les filles ne tarderaient plus à arriver.

Depuis son ascension elle veillait à choisir soigneusement les Calices qu’elle proposait, recueillant des âmes en peine à qui la vie n’avait plus rien à offrir. Capable de s’offrir corps et âme pour effacer leur peine et servir une vie qu’elles ne savaient rendre utile par elles-même. C’était là tout le talent de la Comtesse. Si elle avait effectivement obtenus certains d’entre eux par le biais de l’esclavage, elle mettait le soin à choisir elle-même les meilleurs de ses sangs, choisissant qui serait capable de servir ses desseins. Certaines n’avaient plus rien, Belladone leur offrait un toit et leur promettait en échange de ce sang une vie plus agréable que celle qu’elles avaient connues sur le pavé de la rue. De plus, parfois dans la bauge l’on découvrait les plus jolies perles que l’on eu vu. Même si elle conspuait les humains, elle n’avait guère oublié ces femmes de la maison de prostitution quelle avait côtoyé de son temps de catin. Des amies, des femmes, que la société avait renié.

Soudainement la porte toqua. Le serviteur qu’elle avait mandé un peu plus tôt réapparut, secondé par trois charmantes jeunes femmes. Belladone qui s’était allongée sur une méridienne, son verre à la main coula un regard sur le brun tandis qu’elles se tenaient là juste devant eux, ravissantes. La première, une blonde élancée s’avança puis s’inclina devant l’homme peu avant de prendre place sur le canapé voisin croisant ses jambes. Elle avait un regard de biche doux et un âge juvénile. La seconde, brune avait la peau matte, cette dernière elle décida de venir s'appuyer contre un accoudoir  et la dernière resta debout dotée d'une magnifique chevelure noire et visiblement plus âgée.

— Voici Ambre juste en face de vous, Agathe sur le côté et Nyx.  Toutes trois fraichement recueillies sous notre toit. Alors dites moi cher Monsieur qu’est-ce qui vous attire ?

Belladone se releva, verre en main. Elle était désormais sur son terrain de jeux, et lui, en était la proie.  

— Comment les aimez-vous ?


Elle approcha d’Ambre dont le regard était détourné pour se pencher par dessus elle, découvrant des doigts son cou en écartant sa longue chevelure de blé. Fermant les yeux elle huma l'air un instant, la laissant lentement détourner son visage malgré les rougeurs évidentes de ses joues. L’immortelle se souvint alors pourquoi elle avait choisit cette douce jeune fille. Ses parents l’avaient vendu pour s’acquitter de leurs dettes et son tempérament docile était des plus plaisant. Belladone put sentir au travers sa peau, son odeur et ses pupilles se dilatèrent, bercée par son doux parfum.

— Vierges peut-être ? Ambre a le sang le plus limpide que j’ai pu voir au cours de ses dernières années. Son fluide est un vrai délice fruité sur le palais. Néanmoins elle est fragile et je n’aimerais pas que vous la brusquiez avec un instinct mal placé alors je vous demanderais, si vous la choisissez de savoir vous montrer particulièrement attentif.

Sa voix était joueuse, presque sèche tandis qu’elle dardait l’homme d’un regard prédateur, puis elle s’éloigna d’Ambre pour approcher de Nyx tout en invitant l’homme à s’approcher.

—  À moins que vous ne préfériez quelque chose de plus….. Puissant ? Nyx possède un sang explosif et bien plus nutritif. Elle est faite pour les grands appétits, et sait apaiser la soif.


Prenant la main de cette dernière la jeune femme tendit son verre attendant que la concernée avance sa main. Cela fait, elle découvrit de sa manche une dague. Toujours consciente de la présence de l’homme mais l'ignorant elle fit coulisser d’un mouvement bien placé la lame acérée contre sa paume pour en faire jaillir une fine ligne de sang qui bientôt coula avec abondance. Nyx serra les dents sans protester se contentant de sourire à la femme tout en laissant son liquide sanguin s’écouler dans le verre de cette dernière.

Belladone avait recueillit ces filles elle-même. Elle connaissait les moindres détails de leur vie, leur avait offert une chance de retrouver un but. Voilà pourquoi ces dernières bien que non rassurées n’étaient guère plus effarouchées que cela.

Aussi elle se retourna vers son invité et lui tendit son verre, inquisitrice.
Il devait le boire en gage de bonne foi n'est-ce pas ? Il le devait.


Eckhard Draxler
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptySam 23 Sep - 6:36
Où ai-je donc foutu les pieds, maintenant ?

Eckhard avait suivi Belladone dans ce qui lui semblait un boyau interminable vers les entrailles de la terre. La bâtisse, déjà assez sombre, gagnait une atmosphère bien plus suffocante. L’escalier qui le conduisit en bas, donnait déjà cette sensation de constriction. Avant même d’avoir mis le pied sur la dernière marche de cet escalier, que déjà des parfums divers et variés lui gagnaient les narines. De la sueur, du sang, du sexe, et de l’encens pour tenter de les dissiper. L’endroit était propre, oui, mais le manque de ventilation concentrait ces odeurs en un miasme qui étourdissait presque l’odorat de l’Homme Loup. Quant à son ouïe, elle captait çà et là les échos étouffés de voix, de grognements de plaisir à travers les portes tout autour de lui. Son esprit commençait à se dissiper, ses sens bien trop sollicités pour être concentré sur la suite des évènements, jusqu’à ce qu’un homme -ou plutôt un vampire- se présenta à eux en s’essuyant les lèvres. Il fut tiré d’un coup de son tourbillon, le temps de poser les yeux sur lui. Eckhard accrocha son regard dans celui du vampire, le saluant à peine d’un signe de tête lorsqu’il lui adressa ses politesse, jusqu’à ce qu’il passe dans son dos. Deux ou trois barils de salpêtre, un fût d’huile, et tous ces salopards prétentieux en auraient pour leur argent.

Il finit par entrer dans ce qui semblait être son salon réservé. Eckhard se sentit déjà un peu plus léger, plus à l’abri des nuisances précédentes. Il se dit qu’un instant de solitude l’aiderait à retrouver son calme et sa quiétude, le temps de reprendre ses esprits et d’imaginer une pirouette qui le sortirait de là sans avoir à goûter quoi, ou qui que ce soit. Belladone resta cependant, le temps de lui faire une mise au point des pratiques et des clauses à respecter en ces lieux. Si tout ceci lui semblait bienvenu, il fut cependant surpris de ne pas la voir quitter la pièce en insistant pourtant sur la discrétion à laquelle ses invités avaient droit. Elle leur servit même un verre de vin chacun. Lorsqu’un hôte de marque vous offre personnellement un apéritif, il est de bon ton d’accepter, ce qu’il fit. Il saisit son verre, et le but assez rapidement, espérant que l’alcool y était assez fort pour l’aider à faire défiler le temps un peu plus vite. Mais non, elle était encore là. Même lorsque son bétail passa la porte, accompagné d’un servant. Quatre ou cinq barils de salpêtre, deux tonneaux d’huile.

Le regard d’Eckhard était fixé dorénavant sur les demoiselles qui venaient de passer la porte. Il ne faisait plus attention à rien d’autre ; il n’avait plus besoin de scruter la pièce, de chercher à comprendre ceux qui la peuplaient. Il avait toutes les informations qu’il voulait, seule l’idée lui manquait. Prit de court, sans alternative, se sentant encore plus que maudit au regard de ce salopard de Dieu. La première fille était jeune, et respirait l’innocence. La seconde avait un air exotique, sortie de contrées lointaines. La troisième, elle, ne semblait pas en être à son baptême de feu.
Il resta assis face à elles, ses yeux trahissant de plus en plus son irritation. Il avait l’impression qu’on lui faisait la présentation des plus belles juments du royaume ; elles avaient beau l’être, elles semblaient avoir perdu leur statut d’humaines. Ambre, Agathe, Nyx. Ravi, pas ravi de les rencontrer. Belladone le sortit de son marasme.

La matrone avait vu juste dans son jeu, et certainement depuis un moment. Eckhard repassa leur conversation dans son esprit, mot pour mot. Il avait fait une erreur dans une phrase, un mot ou une expression qui l’avait trahi. Et elle avait compris. Ce n’était plus qu’un jeu pour elle, et il devrait certainement devoir y plier pour ne pas perdre son accord. Il se prit les mains l’une contre l’autre, et serra ses doigts, quasiment crispé, un peu perdu. Il avait été bon combattant, il avait été bon stratège, et il avait perdu pendant un échange verbal. Tout ceci le conforta dans son idée que la politique et ses joutes verbales n’étaient pas de son monde ; ou plutôt qu’il n’était pas du leur. Il se sentait faible face à elle, à cet instant précis, sentant des pointes extatiques d’arrogance et de domination dans sa voix. Eckhard manqua d’exploser de rage, mais quitta son fauteuil sans un mot. Il regarda Belladone froidement dans les yeux, le menton relevé. Il n’avait pas abdiqué, loin de là, mais il comptait faire les choses à sa façon. Il posa le bout des doigts sur la bordure de la coupe, la refusant poliment avec un simple petit geste de la tête.

« Vous l’avez dit vous même. Ce sont des besoins de bête, nul besoin de coupe. »

Ses yeux s’embrasèrent assez subitement, toujours plongés dans ceux de Belladone. Il put remarquer un petit pas en arrière des trois demoiselles, certainement toutes surprises de voir cette teinte feu et ambre plutôt qu’écarlate. Ce n’était pas habituel pour elles, et vraisemblablement mauvais signe. Sans briser le contact des pupilles de son hôte, il congédia les autres d’un mouvement de la main pour des moins nonchalants. Puis il ferma les paupières, avant de complètement délacer sa chemise, puis de l’enlever et de l’envoyer en boule sur le sofa le plus proche. Il invita Nyx à se diriger vers le centre de la pièce, où le sol semblait avoir été étudié pour accueillir des corps sans désagréments. Elle s’y allongea, et il tourna le dos à Belladone.
Il prit une grande inspiration, avant de faire rouler ses épaules et de serrer les poings. S’il était de nature bien bâtie, son voyage avait tout autant impacté son physique. Le fait de ne pouvoir manger à sa faim tous les jours par manque de proies à chasser, les rations à partager avec ses camarades l’avaient aminci. Son entraînement quotidien n’avait pourtant pas été laissé de côté, lui sculptant une musculature svelte mais soigneusement dessinée.  Il avança doucement, ses yeux enflammés rivés sur une Nyx qui semblait de moins en moins prône à la soumission silencieuse. Eckhard s’agenouilla face à son Calice, posa ses mains sur ses cuisses, et prit une nouvelle inspiration. Puis il poussa un juron, avant de se passer une main dans les cheveux.

Il avait été à deux doigts de commettre ce qu’il considérait comme l’irréparable. Arracher une vie innocente. En se transformant en Loup, pour jouer le jeu pervers de Belladone, en se laissant porter, il l’aurait très probablement tuée, ou poussée à une retraite anticipée. Il ne pouvait pas admettre que ce qu’il considérait comme sa ligne de conduite soit piétinée, qu’il doive mettre de côté sa droiture et son honneur.

« Va-t-en ! » pesta-t-il contre la pauvre Nyx.

Il la regarda s’exécuter en hâte. La malheureuse, elle ne devait pas avoir gardé une image très noble de sa personne, mais elle avait au moins une chance de s’éviter le pire client de cette journée. Eckhard se redressa, doucement, avant d’aller chercher sa chemise. Entre temps, il prit sa bourse et l’envoya dans la direction de Belladone.
« Madame Thorn » dit-il, en revenant à sa hauteur, la dévisageant froidement. Il ignorait totalement le couteau qu’elle tenait en main. « Pensez ce que bon vous semble, mais je tiens beaucoup moins de l’animal que vous. Je ne bois pas de sang humain ni ne les mange, je ne bois pas le sang vampire. Au diable cet accord s’il en est, je ne vous ferai pas le plaisir de m’abaisser à votre niveau. J’avais cru rencontrer la plus belle créature qui m’ait été donné de voir en trois cents ans, j’en suis profondément déçu. »
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptySam 23 Sep - 20:57


Avait-elle joué avec lui ? Pas tant, non, mais elle s'était joué de lui, comme une douce tentation à laquelle elle n'avait pu résister. Un jeu auquel lui-même s'était proposé de participer et auquel il l'avait ouvertement invité. Ne lui avait-il pas énoncé après tout son désir premier comme étant celui du sang ? Si, bien sur, même si cela n'avait été une excuse. N'avait-il pas susurré combien il avait hâte de découvrir tout cela ? Tout autant. Et qui désormais lui faisait l'affront de refuser son offre ? Lui.

Toutefois, si effectivement il y avait eu une part de jeu, une toute autre partie de Belladone s'était montrée honnête au cours de cet échange du fait qu'ils traitaient affaire. À présent elle se sentait en colère de voir son geste bafoué d'un simple caprice quand elle n'attendait de lui qu'une chose : savoir accepter son offre comme un présent. De toute évidence ce geste de bonne foi ne payait guère plus qu'une bouchée de pain. Glaciale en bordure, c'est pourtant le sang bouillant qu'elle dévisageait son invité qui, il y a peu encore avait manqué de se donner en spectacle. Une attitude qui l'avait mené au comble de sa tension quand elle avait réalisé juste là sous son regard qu'il comptait profiter de Nyx sans autre forme de pudeur. Sur le sol et sous son regard. Comment avait-il osé ?!

Voir un être aussi abjecte profiter de l'une de ses filles de la sorte lui avait fait serrer ses phalanges sur le verre avec plus de tension qu'elle ne le cru. Ce dernier se fissura sous ses doigts. Décidément, il faisait preuve d'une rare impétuosité. Avait-on jamais osé faire ça sous son nez ?! L'humeur orageuse qui se profilait sous les traits éparses de la vampire étaient loin d'êtres de bonne augure. Laissée bouche bée, indignée, elle dardait son dos d'un regard ardent alors qu'il était penché là sur elle, semi dénudé. Elle devinait presque la silhouette de la bête qui se dessinait sous ses muscles dans pareille posture. Prête à lui arracher le coeur s'il esquissait le moindre geste de travers sans le savoir elle attendait le moment où il commettrait définitivement un faux pas. Les doigts tordus sur sa dague.  

Ce fut à peine un soulagement de le voir finalement faire marche arrière. Quand il recula en ordonnant à Nyx de fuir les lieux, Belladone se demanda s'il l'avait blessé ou s'il lui avait fait du mal sans qu'elle ne le voit. Non pas qu'elle avait pour habitude d'interférer dans les goûts de ses invités mais, elle ne s'en remettait pas qu'il lui ai demandé de s'allonger là en pleins milieu du salon alors qu'elle n'avait même pas quitté les lieux. Et cela avait été aussi supportable que de voir un rat mort. Frustrée de recevoir une telle réponse à son hospitalité, elle lança un regard à Nyx qui quittait les lieux une dernière fois puis se retrouva à nouveau seule face à son invité.

Tout ceci, elle n'y était guère habituée. Savoir qu'une situation lui échappait comme elle avait faillit le faire à l'instant même avait le dont de lui faire perdre la raison. Toujours pestant en silence c'est d'un doigt qu'elle réceptionna la bourse qu'il avait la "bonté" de lui envoyer, sans broncher. La cerise sur le gâteau fut peut-être ces paroles, plus que la posture qu'il adoptait. Peinte par la stupeur elle resta muette plusieurs secondes. Plus sauvage que lui ? Elle ? Quelle ironie quand l'on savait que quelques secondes plus tôt c'est sous ses yeux qu'il allait s'y prendre !

— Voyez vous cela.... Ne put-elle que murmurer tout bas, la tension ramenée à son comble.

Encaissant en silence ce nouvel affront elle cessa de respirer pour s'épargner l'odeur brûlante qu'il portait. Elle sentait sa chaleur diffuse dans l'air flotter autour de lui. Ses derniers mots l'avait perturbée. Tant de balivernes à son sujet. Elle se savait agréable et désirable à l'oeil mais ces mots là, elle ne pouvait y accorder de crédit bien que le compliment fusse beau. De sa bouche à lui elle ne pouvait l'accepter. Alors, sans prendre le temps de répondre, le regard fiévreux, elle porta la coupe qu'il avait dédaigné à ses lèvres pour en déguster le précieux liquide, buvant ce dernier sans lâcher son regard comme pour appuyer ses dires. Seulement ensuite elle repoussa l'objet sur la commode à côté et persiffla d'une voix venimeuse.

— Vous osez me juger ?
Qui êtes vous pour cela ? Un rustre peut-être non car... Rappelez-moi qui allait manquer de se donner en spectacle à l'instant ? Qui donc se pressait il y a peu de découvrir tout cela et qui à présent me crache au visage dites-moi ? Je veux bien admettre que j'ai omis de préciser qu'il y avait une chambre pour assouvir vos désirs dans cette suite mais cela tenait d'une évidence.

Savez-vous que bien des personnes supplieraient pour pouvoir gouter ce que je vous ai offert ? Chose que vous avez renié sans peine aucune apparemment. Et vous savez quoi ? Je vous tire ma révérence d'oser jouer la fine bouche ! Je croyais que vous teniez à une aide précieuse ? Il faut croire que vous ne savez guère sacrifier un peu de votre fierté pour atteindre vos buts. C’est en finalité que vous n’avez pas tant besoin de mon aide n’est-ce pas ?

Qui venait vraiment d'offenser l'autre hein ?
Elle avait envie de lui planter sa dague dans le cœur. Les hommes étaient méprisant. Ils piétinaient toujours tout. À croire que c'était inscrit dans leurs gênes d'être des mufles. Sa voix devenue menaçante et les braises de ses yeux incandescentes, elle le mettait en présent en garde de ne pas provoquer sa colère. S'il ne trouvait pas les bons mots pour la calmer elle ne sait pas combien de temps encore elle garderait son calme. Elle reprit de plus belle reversant son fiel dans la coupe vide qu'ils partageaient tout en levant sa dague pour la pointer sur lui.

— Quant à parler de beauté, vous les hommes êtes toujours subjugué par la beauté peu importe son enveloppe, vous y êtes si faibles, mais vous ne savez pas voir plus loin derrière cela. Vous êtes aveuglés par vos sens et vos désirs facétieux et c’est ce qui vous perd. Vous êtes le seul à blâmer pour votre déception.

Elle le toisait redressée elle aussi, farouche mais pas moins fière.

Eckhard Draxler
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyDim 24 Sep - 17:43
La colère lui montait progressivement au ventre, au point de sentir comme un acide lui ronger les entrailles. Il l’avait déjà fait, c’était tellement simple pour un homme de sa carrure ; il songeait à lui écraser son délicat petit cou avec une main. Si un vampire mâle avait eu sa mâchoire broyée, sa nuque craquerait comme un petit gâteau apéritif. Même si c’était dommage de briser un si joli minois, il n’en était pas loin, et la tentation se faisait de plus en plus forte. Quelque part, il appréciait tout autant voir la belle et froide Belladone dans cet état. Comme une petite victoire personnelle, voir cette femme hors de ses gonds, les yeux incandescents de rage sa voix non plus autoritaire mais fulminante était un régal. Il l‘avait poussée à perdre contrôle de ses émotions, et c’était peut-être sa porte de sortie. Il regarda le couteau, avant de sourire. Un sourire arrogant malicieux et provocateur au possible en levant les bras en croix comme en l’invitant à faire le pas de trop.

« C’est donc ma faute en tant qu’homme si je suis charmé ? Voyez-vous donc. Vous êtes apprêtée comme si vous partiez à un bal de la Cour Royale, regardez-vous ! Osez me dire que vous n’espériez pas faire flancher les coeurs, et tourner les têtes en ce jour ! Allez-y ! », dit-il en riant.

Eckhard avança, jusqu’à mettre le poignard au contact de sa peau, allant jusqu’à sentir la pointe enfoncer sa peau sans la percer. Il la regarda bien plus sérieusement, en penchant la tête sur le côté. Sa tête penchée en avant pour bien donner l’impression de dominance qu’il héritait de par sa taille supérieure à la sienne. Dans un duel physique, si elle voulait jouer à la maligne avec sa petite lame, il lui faisait bien comprendre qu’elle perdrait jusqu’à sa vie, en moins de temps qu’il lui faudrait pour appeler la garde. Son ton devint beaucoup plus calme, et sa voix beaucoup plus douce. En y repensant, elle pouvait bien le juger à cause de ce qu’elle avait vu de lui, car c’est bien ce qu’il lui faisait, à cet instant précis.

« Je ne suis pas le noble venu à vous pour affaire. Je déteste cet endroit, je déteste la façon dont vous avez de traiter ces filles comme du vulgaire bétail à la merci du moindre fortuné trop oisif et dorloté pour aller chercher ce dont il a besoin lui-même. Je déteste ça. Je ne bois pas de sang, je ne mange que la chair animale, et je ne.. cultive pas ces gens pour le pouvoir, moi. »

La rage en lui était encore bien présente, et la pièce lui donnait l’impression de manquer d’air, tant elle était coupée du monde extérieur. Il sentait presque sa peau le brûler, tant le feu grondant en lui était fort. Son souffle était calme, mais profond, et ses yeux toujours rivés sur Belladone. Il pencha la tête de l’autre côté, avant de poser le doigt sur son cou, comme s’il était un miroir, pour lui indiquer sa cicatrice.

« Oui, je refuse vos services », dit-il en avançant, ignorant la perforation de sa propre peau par la lame.
Une douleur faible, comparée à celle qu’il connut dans sa vie. Il tapota son cou, encore une fois.
« J’imagine que vous n’en avez rien à foutre, si vous avez la vôtre, vos filles peuvent aussi l’avoir je suppose. Mais je ne serai pas... -je ne serai jamais celui qui leur fera ça. »

D’un geste vif et habile, tout en la regardant dans les yeux, il lui arracha sa dague des mains. Puis il la fit bondir de sa main, avant de l’attraper par la lame et de s’en débarrasser en l’envoyant se figer sur le dossier d’un sofa. Puis il s’inclina face à elle, en moulinant du poignet comme un artiste saluant son public, avant de se relever tout sourire. Un sourire franc, et malgré tout bienveillant. Il n’arrivait pas, même s’il la détestait, à la haïr au point de souhaiter sa mort. Pas comme « eux ». Il ne pouvait lui souhaiter que de se tenir loin de lui, sous peine de voir cette bâtisse brûler, enivrant tout le faubourg de ses réserves d’encens, très certainement conséquentes.

« J’imagine l’inutilité de vous demander d’avoir de la grandeur d’âme, considérez moi alors comme un messager. Vous avez ma mise en garde contre ces gens, je n’ai plus besoin de votre aide. Je partirai d’ici avec ma droiture, ou les pieds devant. »
Belladona E. Thorn
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Âge du personnage : On ne demande pas son âge à une -vieille- femme..

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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyDim 24 Sep - 20:31

Belladone se sentait salie par ses propos qui finalement ressemblaient bien trop à ceux qu'elle avait déjà pu entendre au cours de sa vie et elle les essuya sans broncher, ni même ciller. Elle ne lui ferait pas ce plaisir elle non plus, d'entrer dans son petit jeu, peu importe combien elle avait envie de lui arracher les deux yeux pour l'empêcher de la regarder plus longtemps.

L'apparence était une chose qu'elle savait apprécier et arborer une toilette séduisante aussi, néanmoins c'était une obligation de son rang, une image qu'elle devait véhiculer car tel en était le prix. Peu importe si son désir aurait été de se revêtir autrement elle n'avait d'autres choix que de respecter les codes. Mais pouvait-il seulement se l'imaginer ? Non il était trop occupé à préférer penser qu'elle était l'une de ces riches donzelle qui se pavanait dans le luxe de sa fortune. Il était comme tous les autres. Elle ne pouvait le blâmer de ne voir que cette image car c'était bien celles que tous les nobles titrés véhiculaient. Nichés dans un train de vie qui ne laissait aucunement transparaitre une conscience réelle du monde qui les entourait et que Calice, elle connaissait bien. Une image dont elle-même se servait savamment en dehors de ces lieux.

Néanmoins, c'est l'image de sa soeur qu'il entachait ainsi, malgré le fait qu'elle ai de loin laissé filtrer sa réelle identité au travers leur échange jusque là elle avait su jouer de concert. Elle ne pouvait le tolérer, aussi se sentit-elle tout à coup terriblement lasse de ces calomnies qui lui jaillissaient au visage et de cette soudaine provocation dont il se pâmait. Coupable de souiller l'image de sa soeur au travers cette perte de contrôle.

Mais qu'aurait-il pu y comprendre, lui cet ignorant ? Rien, alors à quoi bon lui répondre.

Lorsqu'il avança sur la lame qu'elle tenait pointée sur lui elle n'émit pas de réaction, son regard fixant la pointe qui bientôt l'entaillait par sa seule volonté. Voulait-il lui faire comprendre à quel point il n'avait pas peur d'elle ou lui montrer combien il était stupide ? Plus que la bêtise de ce geste ce fut l'odeur de sang s'accapara toute son attention. La stupeur fut irréelle à l'odeur qui se répandit entre eux, filtrant jusqu'à ses narines tel une entêtante fragrance. Comment un être aussi indélicat pouvait sentir si bon ? Se raclant la gorge elle perdit un peu de sa poigne sur la lame, sans voir le loup approcher presque troublée trop obsédée par la liqueur fine qui avait naquit à la surface de sa peau.

Elle n'était plus qu'un feu de colère une rage sourde, un regard assassin qui faiblissait aussi vite qu'il était monté, rattrapé par le poids d'une vérité autre.

— Pensez ce que vous voulez, je ne me donnerais pas la peine d'élargir un esprit dors et déjà trop rétrécit. Pensez que je suis plus monstrueuse que vous ne l'êtes si ça vous arrange, vous êtes comme tous en besoin de vous rassurer quant à votre propre monstruosité. Je ne serais pas là pour vous détromper, je ne prétends pas une humanité qui ne m'a jamais habité.


Non elle assumait ce qu'elle était sans détour ne souffrant d'aucuns regrets. Elle buvait le sang humain, elle tuait des vies et n'y portait qu'un intérêt moindre. Effectivement. En revanche, elle aimait aussi ces femmes qu'elle lui avait présenté à sa façon. Il n'était qu'un spectateur qui se permettait de juger une situation d'après les paramètres qu'il avait vu sans connaitre les coulisses de la scène.

— Si vous détestiez cela il suffisait de le dire vous n'aviez guère besoin de me susurrer que vous désiriez goûter tout ceci, c'est hypocrite. Mais, je vous en prie continuez à vous faire passer pour une créature descente, vous n'en restez pas moins autant que moi une abomination de la nature qui n'aurait jamais du naitre. Un prédateur qui tue et qui se nourrit d'autres vies peu importe combien vous le niez.

Tout ceci était aussi hypocrite que toute cette rencontre finalement n'est-ce pas ? Alors pourquoi avait-elle espéré au fond d'elle que l'issue soit toute autre, pourquoi s'était-elle donné de la peine pour tout ceci ? Lorsque son doigt se posa sur son cou Belladone plissa les paupières, se raidissant d'avantage lorsqu'il se permit de tapoter la marque qui ornait la base de cette épaisse forteresse d'ivoire. Aussi elle écarta sèchement son visage pour esquiver ce geste, les pupilles semblables à deux puits noirs sans fond. Cette maudite cicatrice. Elle frissonna, plus désireuse que jamais de e planter ses crocs dans le derme chaud et palpitant de son cou. Elle fulminait de le voir pointer cette marque cuisante du doigt, cela renforçait son désir de l'asservir à elle sans autre forme de procès pour le faire abdiquer. Pourtant elle se refusait à céder à cette invitation silencieuse.

— Silence !!! Gronda-elle. Épargnez-moi vos accusations douteuses !
Vous ne savez rien de mes filles ni du reste, alors ravalez ces sornettes que vous proférez, cela vous rendra peut-être plus intelligent que vous ne l'êtes.


Lorsqu'il entreprit de lui faire lâcher sa dague elle ne chercha pas à l'en empêcher et le laissa la désarmer sans aucune forme de lutte. Lasse de cette attitude, plus encore lorsqu'il s'inclina de la sorte lui donnant l'impression d'assister à la fin de représentation du bouffon du roi.

Fermant les yeux, et ravalant la bile qui baignait dans le fond de sa gorge elle inspira lentement puis expira, tentant de maitriser son souffle lourd de colère. Elle le haissait mais pas suffisamment pour désirer un bain de sang. Une part d'elle s'y refusait, regrettant que les choses se déroulent de la sorte. Elle leva une main pour la passer sur son front et ferma les paupières.

Son instinct, ces envies primaires lui intimaient de céder à ce désir de lui briser les jambes sur le champ, de le réduire en charpie, mais une autre part d'elle, encore écorchée vive par la façon dont il avait souillé sa tentative d'honnêteté n'avait pas le coeur à le blâmer d'être quelqu'un de trop libre et non conventionnel pour accepter toutes ces règles. Aussi, cette odeur qu'il portait achevait la vampire, l'étouffant de toute part.

Incapable de savoir dégager la situation elle murmura donc

— Je ne vous retiens pas plus longtemps, et j'ai donné ma parole. Si vous estimez toujours avoir le besoin de mon aide, je vous l'apporterais parce que je vous ai donné mon accord et je ne reviendrais pas dessus. Il vous suffira de me le faire savoir. Un domestique vous raccompagnera. Aussi...


Passant à côté de lui elle lui plaqua sa bourse sur le torse.

— Je n'ai guère besoin de ceci, reprenez-le, un cadeau ne se paye pas.

Cela fait elle partit se servir une nouvelle coupe de vin pour refroidir son cerveau en ébullition, en besoin d'effacer l'odeur imprimée à ses narines, assoiffée. D'ici quelques secondes il quitterait les lieux, elle pourrait prendre le temps de regagner son sang froid. Fermant les yeux elle s'immobilisa pour entreprendre de retrouver ses esprits.
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L'appel du Sang - Chapitre Premier EmptyLun 25 Sep - 6:41
Eckhard s’était trop avancé. Il en avait trop dit.
En face de lui, il ne voyait plus qu’une femme fulminante, grondant de colère, et surtout d’amertume. Elle avait été profondément blessée par ses paroles. À vrai dire, l’émotion, sa propre fronde et son entêtement l’avait poussé à poser un jugement de valeur sur ce qu’elle était, alors que jusqu’à il y a peu, il ne la connaissait même pas. C’était une vampire, et elle aussi pouvait paraître bien en deçà de son âge réel. Il avait été impétueux, de penser que du haut de ses 300 ans, toute personne en face de lui ne pouvait être que très jeune. Et il repensa profondément à sa propre vie.
Passer plusieurs siècles dans l’ombre d’une noblesse qu’il pouvait voir, mais pas saisir même du bout des doigts. La vie d’un paria, dont l’origine avait été gardée sous scellé, et cachée aux yeux du monde. Le garçon qui restait dans ses quartiers les soirs de fête et de mondanités.
Et jamais il n’a pu en parler. Jamais il n’a rencontré de personne au passé trouble, qui l’aiderait à éclaircir sa propre existence en l’aidant à dédramatiser son passé. C’était une vampire, avec une cicatrice. L'imbécile ne réalisait que trop tard la gravité d'une telle marque sur la peau d'une immortelle.
Et malgré tout, elle accepta de maintenir l’accord.

Le souffle du Loup se fit profond, et légèrement saccadé ; lorsque sa propre bourse lui frappa le torse, il manqua de ne plus le reprendre. Il la regarda passer à sa hauteur puis baissa la tête, presque honteux, pour s’affairer à rattacher sa bourse à sa ceinture. Sa chemise, jusque la gardée et en boule dans sa main retrouva les épaules de son propriétaire, qui ne prit même pas le temps de la réajuster ni de la défroisser même sommairement. Il se retroussa les manches jusqu’aux coudes, plus à l’aise de cette manière et secoua la tête de gauche à droite pour défaire une chevelure bien trop ordonnée à son goût. Il avait presque l’air d’un détrousseur bienheureux que d’un noble. Il avait presque l’air d’être lui-même. Il prit une vive inspiration, et s’approcha de la porte. Il posa la main sur la poignée, puis se tourna à moitié vers elle. Elle tentait visiblement de reprendre ses esprits, aux prises avec la bouteille de vin.

« Madame, je… Je vous remercie. »
Il marqua un petit instant de pause, avant de reprendre.
« Je suis  sincèrement désolé. Je n’ai aucune excuse quant à mon comportement, ni à ces mots que j’ai pu vous tenir. Je n’ai pas le droit de juger votre valeur, et je ne peux que garder mon opinion sur votre activité. Je ne vous ai pas menti de bon cœur, croyez-le. »

Se mordant la lèvre pour ne pas en rajouter, il ouvrit la porte, et adressa un signe au premier domestique qu’il croisa pour lui demander une escorte jusqu’à la sortie. Au moment de quitter le portail du domaine, au « Nous espérons que vous avez passez un moment agréable » d’usage, il se contenta de marmonner un « fermez-la voulez vous » dans sa barbe. Il était inutile d’en rajouter une couche, surtout à un pauvre domestique qui n’a rien demandé. Mais c’était pas loin de sortir à voix haute. Il était passablement irrité par sa propre conduite, et de cet échange qu’il aurait préféré garder aimable et courtois. Du gâchis, finit-il par penser.
Les hommes qu’elle lui avait assigné l’attendaient presque en rangs, à quelques pas à peine de sa propre escorte de mercenaires. Eckhard les salua un à un en se présentant à eux. C’était sa façon de faire. Même s’il n’était pas capable de retenir tout leurs noms, le simple fait d’avoir ce début de proximité avec eux les mettait pour la plupart en confiance.
Il en aurait besoin, et il ne tarderait pas à avoir du travail pour s'occuper l'esprit.
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